Résistances

Les réfractaires depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie (17ème épisode • novembre-décembre 2024)

Mis à jour le 23 décembre 2024

Actions contre la guerre Antimilitarisme Guerres

Mise en ligne : Lundi 11 novembre 2024
Dernière modification : Samedi 4 janvier 2025

Depuis octobre 2022, Guy Dechesne recense longuement les actes de désertion, d’insoumission, de désobéissance et d’exil posés pour refuser de combattre, les actions de désobéissance civiles pour entraver la guerre et les appuis que les réfractaires reçoivent tant dans les pays concernés qu’à l’étranger dans le prolongement d’un dossier paru dans le numéro 164-165 de « Damoclès ». Cette rubrique est rédigée à partir d’un suivi méticuleux des médias. 17ème épisode, novembre-décembre 2024.

Retrouvez les épisodes précédents dans la rubrique Résistances

Russes d’Europe

Des Russes de gauche en Europe, appellent les autorités françaises et de l’Union européenne à reconnaître que la désertion de l’armée russe accorde le droit à un visa humanitaire dans les pays de l’Union et à une demande de droit d’asile. Ils réclament des subventions pour des initiatives publiques en faveur des déserteurs. Ils ont organisé une manifestation à Paris le 21 décembre 2024.

Natalia Arno

La directrice de la Fondation Russie libre, Natalia Arno, a été agressée à Londres, le 13 novembre 2024, et son téléphone portable lui a été dérobé. Elle avait déjà fait l’objet d’au moins une tentative d’empoisonnement [1].

Ilya Vasiliev

Inculpé pour une publication sur Facebook, le responsable d’un centre zen bouddhiste, Ilya Vasiliev pose au tribunal, la Constitution russe dans une main et dans l’autre les références à deux de ses articles : Article 28. Chacun a la liberté de conscience et de religion. Article 29. La liberté de pensée et d’expression est garantie à chacun [2].

Morts en captivité

Le nombre de prisonniers politiques continue d’augmenter régulièrement en Russie. Et de plus en plus de personnes condamnées pour des raisons politiques meurent en prison. De telles tragédies se produisent désormais régulièrement. La répression s’intensifie, les peines de prison augmentent, le harcèlement (y compris le séjour continu en cellule disciplinaire) devient une pratique constante, aucune attention n’est accordée à l’âge et à l’état de santé, les personnes malades en captivité ne sont pratiquement pas soignées. La pression psychologique devient insupportable.

Au moins quinze prisonniers politiques sont morts en 2024. Parmi eux figurent l’homme politique Alexeï Navalny, le pianiste Pavel Kushnir, mort après une grève de la faim et de la soif, la journaliste ukrainienne Victoria Roshchina qui a reçu en 2022 le prix de la Fondation internationale des femmes dans les médias pour le courage dans le journalisme, Alexander Demidenko, bénévole pour l’aide aux Ukrainiens, le citoyen russe Dmitry Shletgauer, condamné en Biélorussie à douze ans de prison pour espionnage. La cause de la mort de plusieurs de ces prisonniers n’a pas été révélée. Il n’existe toujours aucune information selon laquelle les autorités russes auraient remis le corps de Roshchina à l’Ukraine [3].

Roman Shvedov s’est déclaré anarchiste et a refusé l’assistance d’un avocat. Le 18 décembre 2024, il s’est suicidé en cellule d’isolement quelques heures après sa condamnation pour l’incendie d’un bâtiment administratif, selon le FSB, « pour protester contre l’opération militaire spéciale visant à protéger [les républiques autoproclamées annexées par la Russie] et la mobilisation partielle en Russie » [4].

Selon le Commissariat militaire de la République de Sakha (Yakoutie), à Iakoutsk, dans la nuit du 20 décembre 2024, un incendie s’est déclaré dans un centre de détention de militaires qui ont quitté leurs unités sans autorisation. On déplore cinq décès et sept hospitalisations.

La Free Yakutia Foundation a révélé que 28 militaires qui ont refusé de retourner au front après avoir été blessés étaient détenus, battus, torturés, empêchés d’utiliser les toilettes et de rencontrer des proches. La chanson Je suis russe est jouée à plein volume [5].

First Department

L’organisation de défense des droits de l’Homme First Department a publié une vaste étude sur les poursuites en Russie en vertu des articles du Code pénal sur la haute trahison, la coopération avec un État étranger et l’espionnage.

Au 15 décembre 2024, en Russie, 792 personnes ont été impliquées dans ce type d’affaires depuis le début de l’invasion à grande échelle des troupes russes de l’Ukraine en février 2022. Depuis le début du règne de Poutine, pas un seul acquittement n’a été prononcé en vertu de ces articles. Au moins neuf personnes sont mortes en détention après le prononcé de leur peine, sept personnes sont mortes en détention provisoire avant leur procès. Les tribunaux russes publient sur leurs sites Internet des informations sur moins de 70 % des affaires examinées [6].

Enfants ukrainiens

Albert Herszkowicz, Bertrand Lambolez et Arnaud Lévy analysent dans un opuscule La russification forcée des enfants ukrainiens [7] et ils établissent l’organigramme des responsables de cette organisation concertée par le parti poutinien Russie-Unie, sous couvert de missions humanitaires.

Les chiffres communiqués par les autorités russes de décembre 2022 à février 2023 font état de plus de 700 000 enfants ukrainiens déplacés sur le territoire de la Fédération de Russie et de 320 000 enfants ukrainiens restés en Ukraine occupée à la rentrée de septembre 2023. Marioupol, où vivaient 58 000 mineurs de moins de 14 ans en 2021, ne comptait plus que 10 000 enfants scolarisés à la rentrée 2022.

Sur 7,5 millions d’enfants présents en Ukraine avant le 24 février 2022, il en reste 3,2 millions. Les 4 millions manquants sont soit réfugiés en Europe, soit morts, soit en territoire occupé, soit en Russie [8] où ils sont proposés à l’adoption. Plus de 70 % des familles rendent les enfants adoptés, la plupart victimes de troubles de stress post-traumatique. Les enfants sont russifiés et soumis à un endoctrinement militaro-patriotique en vue de leur incorporation militaire. Pour un des planificateurs, Andreï Turtchak, il faut revenir au « système éducatif soviétique [qui] était considéré comme le meilleur au monde ». En décembre 2022, Igor Kastyukevitch est nommé responsable pour l’éducation militaro-patriotique dans les territoires occupés. « Ici, les enfants ont été “ratés” en termes d’éducation. On leur a appris la version “américaine” de l’histoire, où tout est chamboulé. Nous allons régler ce problème », déclare-t-il.

Au 17 décembre 2024, l’Ukraine a recensé 19 546 enfants enlevés, dont 388 ont été rapatriés, 596 enfants sont morts, 1 716 blessés, 1 935 disparus, 16 abusés sexuellement [9]. Les déplacements de grande ampleur d’enfants débutent dans le Donbass occupé le 18 février soit une semaine avant l’invasion de l’Ukraine du 24 février 2022. La propagande russe crée un climat de terreur propice à l’exode massif de la population, prétextant une attaque imminente par l’Ukraine. Les déplacements n’ont pas cessé depuis, en l’absence de combats qui pourraient justifier une mise à l’abri.

À l’hôpital pour enfants de Kherson, avant sa « disparition », la médecin-chef s’est opposée à l’administration d’occupation. La plupart des enfants de l’hôpital ont échappé aux transferts grâce à la falsification de leurs dossiers médicaux par le personnel soignant, ainsi que la plupart de ceux du centre pour mineurs de Stepanivka, en banlieue de Kherson, qui ont été rapidement placés dans des familles de confiance.

La directrice d’un internat réussit à tromper la vigilance des surveillants du centre et à fuir avec les enfants en Géorgie.

La propagande russe soutient que les enfants ont été sauvés d’un trafic d’organe à destination de l’Europe, dirigé par la commissaire aux droits de l’enfant d’Ukraine, Lyudmila Denisova. Anna Kuznetsova, une des responsables russes, prétend détenir la preuve qu’il est organisé « en lien avec des compagnies paramilitaires britanniques [payées par] Coca-Cola ».

22 000 manuels d’histoire ukrainiens sont éliminés des écoles de la région de Louhansk et tous les livres de la bibliothèque de l’église Petro Mohyla à Marioupol sont brûlés.

La répression s’abat très tôt sur le personnel éducatif récalcitrant, comme l’attestent les « recadrages » d’écoles, surveillance de bibliothèques et de musées, remplacements, et tortures.

La multitude d’organisations de jeunesse qui déferlent sur les territoires occupés ont pour objectif commun de renforcer le patriotisme et de réinstaurer la préparation militaire des jeunes en vigueur à l’époque soviétique. Certaines de ces organisations sont issues du DOSAAF (Société volontaire pour la promotion de l’armée, de l’air et de la marine), mouvement paramilitaire soviétique relancé par Poutine en 2009.

Créé en juillet 2022 et inspiré des Pionniers soviétiques, le Mouvement des Premiers vise à préparer « les jeunes [de 6 à 18 ans] à une vie […] basée sur les valeurs spirituelles et morales traditionnelles russes […], l’amour et le respect de la patrie… le sens de leur responsabilité personnelle dans […] le destin de la patrie ».

Un des vecteurs de la rééducation militaro-patriotique des enfants ukrainiens consiste en leur intégration aux classes de cadets militaires des établissements scolaires, qui dispensent une formation militaire aux mineurs de 3 à 18 ans pris en charge gratuitement en internat.

Daniil Bezsonov, vice-ministre de l’information de la région de Donetsk, déclare : « Les Ukrainiens sont pour nous une ressource [en personnel] lors d’une mobilisation pour une future guerre contre l’Otan […] et maintenant ils sont une ressource aguerrie. » Donc une ressource contre leur propre peuple.

La volonté politique et l’appui financier du Kremlin mobilisent les alliés politiques et une galaxie d’organisations ultranationalistes et ultraorthodoxes qui gravitent autour du pouvoir politique et du Patriarcat de Moscou.

Les adoptions de mineurs ukrainiens en Russie ont diminué, ou sont plus discrètes, depuis les mandats d’arrêt délivrés par la Cour pénale internationale à l’encontre de Maria Lvova-Belova, commissaire russe aux droits de l’enfant, et Vladimir Poutine en mars 2023. Elles se poursuivent néanmoins comme en témoigne l’adoption en décembre 2023, rapportée par la presse russe locale officielle, d’un enfant de 7 ans de Donetsk par la famille d’un parachutiste de Pskov soupçonné de crimes de guerre en Ukraine.

Échange et recherches de corps

Le 20 décembre 2024, les corps de 42 soldats morts ont été restitués à la Russie par l’Ukraine qui a reçu les dépouilles de 503 soldats [10].

En Ukraine, les demandes de recherche de disparus s’élèvent à environ 120 000. Elles émanent souvent de la diaspora auprès de laquelle l’ADN est récolté par la Commission internationale pour les personnes disparues, née des conflits de l’ex-Yougoslavie. La Commission déplore le refus politique de coopération de la Russie et partage le résultat de ses enquêtes avec la Cour pénale internationale qui poursuit les criminels de guerre [11].

Otan

Le nouveau secrétaire de l’Otan, Mark Rutte, a prononcé son premier discours après sa prise de fonction : « En moyenne, les pays européens dépensent facilement jusqu’à un quart de leur revenu national pour les pensions, la santé et les systèmes de protection sociale. Nous avons besoin d’une petite fraction de cet argent pour renforcer notre défense [12]. »

Opérations pour simuler des blessures de guerre

Un médecin militaire russe, agissant en collaboration avec deux officiers supérieurs, a effectué des opérations chirurgicales pour implanter des fragments de munitions et obtenir aux soldats des indemnités [13].

Les pertes ukrainiennes

Le président ukrainien a déclaré le 8 décembre 2024 que 43 000 soldats ukrainiens avaient été tués, et 370 000 autres blessés, depuis le début de l’invasion du pays par Moscou. Donald Trump a affirmé que l’Ukraine avait perdu « de façon ridicule » 400 000 soldats (morts et blessés) [14].

Trois ans de prison pour des affiches lacérées

Un tribunal russe a condamné à trois ans de prison un homme qui a lacéré des affiches proposant un contrat militaire. Son vélo a été confisqué comme instrument du crime.

Il a déclaré que sa mère lui avait appris qu’« il n’y a rien de plus précieux que la vie humaine ». Il ne voulait pas tuer des gens et prêter serment [15].

Guerre civile morale

La sociologue Anna Kuleshova publie une étude sur les Russes partis en exil pour y travailler. Presque aucun d’entre eux n’a été rejeté par ses amis ou sa famille en raison de son départ. Les couples séparés à cette occasion ont parfois rompu, même à cause de changement d’opinion, soit en Russie, soit à l’étranger à cause de difficultés bureaucratiques. Le père de deux enfants a vu l’un se porter volontaire pour le front et l’autre fuir la Russie par le Bélarus. Un autre a été accusé de traîtrise par son jeune fils, sous l’influence de sa mère. Ce que des sociologues appelle une guerre civile morale. Des compagnes de travailleurs délocalisés sont rentrées en Russie pour être mieux socialisées et pour y scolariser leurs enfants.

Un tiers des exilés interrogés sont de retour en Russie n’ayant pas pu s’intégrer à l’étranger ou pressés de revenir par leurs compagnes. Ceux qui ne sont jamais rentrés n’ont pas l’intention de le faire un jour. Ceux qui avaient rejoint des réseaux de soutien ou d’aide aux réfugiés ukrainiens ont souvent réduit leur activité ou la font plus discrètement [16].

Fécondité

En Russie, des incitations en espèces sont introduites pour les étudiantes qui accouchent, les centres d’appels proposent aux femmes âgées de 18 à 45 ans des contrôles de fertilité gratuits.

Dans les cliniques prénatales, les femmes russes reçoivent des lettres du diocèse et du patriarche Kyrill, qui bénit pour la naissance d’un enfant. En décembre, le ministère de la Santé a décidé que les femmes russes qui décident d’avorter devraient être hospitalisées dans un service accueillant des femmes enceintes risquant de perdre l’enfant désiré [17].

Alexeï Navalny

La veuve d’Alexeï Navalny présente, dans une vidéo sous-titrée en anglais, des enregistrements de conversations, filmées illégalement par les autorités de la prison, entre son mari et ses avocats. Les notes prises par le prisonnier étaient également filmées. Ioulia Navalnaïa appelle à la solidarité avec les prisonniers politiques et en particulier avec les avocats de Navalny emprisonnés pour l’avoir défendu [18].

Artiom Kamardine

Artiom Kamardine est un poète russe. Après avoir été arrêté puis violé avec un haltère, il a été condamné à sept ans de prison pour avoir slamé ses textes antiguerre. Lors de son procès, il a refusé de se repentir. Il a adressé une lettre au Monde [19]. « Je suis né dans la Russie libre. Ce pays n’existe plus, détruit et dévoré par un monstre qui se fait appeler Russie. » Il a été transféré dans une colonie pénitentiaire à cent kilomètres de Moscou. Il souffre du dos et de maux de tête. Cyniquement, un neurologue lui a conseillé de changer de mode de vie pour ne plus avoir mal.

Une historienne de la littérature russe cite un autre poète, Ossip Mandelstam, mort dans un camp : « Seulement en Russie on prend la poésie au sérieux, car on tue les poètes seulement en Russie. »

« À bientôt en liberté ! », conclut Kamardine.

Initiatives civiles anti-guerre

Le 3 décembre 2024, s’est tenue à Berlin la Conférence de Coopération France, Pologne, Allemagne organisée par la Platforma pour les initiatives civiles anti-guerre. L’événement a réuni plus de 130 participants issus de mouvements russes pro-démocratie, d’organisations internationales et d’initiatives de la société civile, avec pour objectif de renforcer la coopération dans la lutte contre la guerre en Ukraine, la défense des droits humains et la promotion de la démocratie en Russie.

L’événement a débuté par des discours de représentants des ministères des Affaires étrangères d’Allemagne, de France et de Pologne, ainsi que du Service européen pour l’action extérieure.

La conférence a porté sur ces sujets : la libération des civils ukrainiens illégalement détenus en Russie ; l’impact de la « fatigue ukrainienne » sur les médias de l’UE et de la Russie, la lutte contre l’agenda anti-genre qui affecte les droits des femmes et les personnes LGBTIQ+, les outils de coopération entre militants, le soutien à l’Ukraine par le biais de la défense des initiatives russes et les besoins humanitaires des Ukrainiens dans les territoires occupés et en Russie.

La prochaine réunion de la Plateforme et des partenaires internationaux aura lieu en mars 2025 à Bruxelles dans le cadre du Congrès des Initiatives anti-guerre, civiques et humanitaires.

Géorgie

Le pouvoir prorusse en Géorgie continue la répression et le brutal tabassage des manifestants par la police ou des gangs d’individus masqués. Deux journalistes d’une chaîne de télévision proche de l’opposition ont été attaqués en direct. Le sapin de Noël devant le Parlement a été décoré avec les photos de jeunes au visage tuméfié par leur passage à tabac parfois jusqu’au coma. Le gouvernement a interdit les lunettes, les casques et les masques de protection [20].

Interceptés

Arte a diffusé le 10 décembre 2024 le documentaire Interceptés d’Oksana Karpovych. On y entend des conversations de soldats russes interceptées par l’Ukraine au début de la guerre d’invasion. La plupart se vantent sans scrupules de vols, de meurtres et de tortures. Leurs mères et leurs compagnes les en félicitent et les encouragent. À son fils qui dit prendre plaisir à torturer, sa mère répond qu’il est comme elle qui aimerait l’imiter. Plus rares, il en est qui disent « Avant, j’étais un type bien. » ou qui, malgré qu’on les rassure, disent qu’ils auront du mal à oublier les horreurs qu’ils ont vues et à trouver le sommeil. Un soldat termine sa conversation en demandant à sa famille de tout faire pour éviter que son petit garçon soit soldat. « C’est ma dernière volonté », conclut-il.

Il est dommage que le film soit constitué de plans fixes interminables sur les dévastations de la guerre qui incitent à passer l’enregistrement en accéléré.

Librairies

50 librairies se sont ouvertes en Ukraine depuis l’invasion du 24 février 2022. La demande ne cesse de croître. Un éditeur spécialisé dans la publication d’œuvres interdites lors de la période soviétique estime que ses ventes ont bondi de 50 à 60 % depuis 2022 [21].

Respiration interdite

Sergueï Mikhaïlov, fondateur de la publication de l’Altaï LISTok, condamné à huit ans de prison et à quatre ans d’interdiction d’activités journalistiques pour avoir diffusé des « fausses nouvelles sur l’armée russe motivées par la haine politique », a été envoyé dans une cellule disciplinaire d’un centre de détention provisoire pour avoir effectué des exercices de respiration treize minutes après le couvre-feu. On lui reproche des articles sur les massacres de Boutcha et de Marioupol [22].

Michelin, un p(n)eu gonflé

Environ 40 millions d’euros de pneus de la marque française ont été vendus à Moscou depuis la mise en place de l’embargo après l’invasion de l’Ukraine en 2022, selon une analyse du renseignement ukrainien obtenue par Mediapart. Michelin dément tout lien commercial avec la Russie. Des pneus Dunlop, Goodyear et Bridgestone se retrouvent sur des avions russes. The Guardian, précise que les pneus Michelin représentaient environ 70 % de ces produits importés en 2023. Ces pneus d’avions sont produits pour la plupart en Thaïlande. Une dizaine de sociétés intermédiaires basées en Turquie, à Hong-Kong, en Arabie saoudite, en Iran et aux Émirats arabes unis serviraient d’intermédiaires. Une filière aux rouages multiples qui concerne également des pièces détachées d’avions, fabriquées notamment pour Airbus et Safran [23].

Nos balles sont pour nos propres généraux

Appliquons la grève aux armées / Crosse en l’air, et rompons les rangs / S’ils s’obstinent, ces cannibales / À faire de nous des héros / Ils sauront bientôt que nos balles/ Sont pour nos propres généraux.

Ce couplet de L’Internationale est appliqué des deux côtés du front russo-ukrainien. Le quotidien italien Il Manifesto rapporte un slogan sur un mur ukrainien à Kharkiv « Les fusils braquez-les contre ceux qui vous les ont mis entre les mains. »

Le 30 octobre 2024, un déserteur pétersbourgeois Alexandre Igoumenov a accueilli le chef de la patrouille venue l’arrêter en lui pointant directement un pistolet entre les yeux : « Tu te tires d’ici, lui aurait-il dit, ou bien le ministère de la Défense aura besoin d’un officier en plus. » Une scène assez similaire s’est produite la semaine suivante de l’autre côté de la frontière.

Le collectif anarchiste Assembly de Kharkiv (assembly.org.ua), qui, depuis février 2022, s’efforce de recenser chaque épisode de rébellion antimilitariste des deux côtés du front parle de la fuite du personnel des forces armées comme d’une vague déferlante.

Environ 60 000 Ukrainiens auraient quitté l’uniforme au cours de l’année 2024, et pas moins de 9 500 rien qu’au mois d’octobre. « Il est certain que le nombre de nos déserteurs a déjà dépassé les 150 000 et s’approche des 200 000, écrit le journaliste de Kiev Volodymyr Boiko, qui sert actuellement dans les forces armées ukrainiennes, Si les choses continuent ainsi, nous atteindrons 200 000 d’ici la fin décembre. »

Du côté russe, on a appris qu’environ mille hommes auraient déserté en masse la 20ème Division de fusiliers motorisés, entraînant même avec eux 26 officiers, dont un major et un colonel.

Un jeune conscrit de l’armée de Poutine stationné sur le front de Koursk écrit : « Beaucoup de nos officiers sont de vrais nazis. J’ai parlé avec le chef des communications de la Division des mortiers, qui, sans détour, m’a exhorté à lire “les penseurs allemands des années trente”. D’un autre côté, les hommes de troupe appartiennent presque tous à la classe ouvrière, et, en général, ils n’ont aucune envie de combattre. Donc, quand j’explique à mes camarades que cette guerre est injuste, une guerre de patrons contre d’autres patrons, beaucoup sont d’accord avec moi. »

Le 3 octobre 2024, à Voznessensk, dans la région de Mykolaïv, environ cent soldats de la 123ème Brigade de défense territoriale ukrainienne ont organisé une manifestation spontanée, refusant d’aller en tranchée pour protester contre le manque d’armes et d’équipements adéquats. La même chose s’était produite la veille à Vougledar, sur le front de Donetsk, où un autre bataillon de la même Brigade avait tourné le dos à l’ennemi et pris la fuite, permettant d’ailleurs aux troupes russes de conquérir la ville. La seule victime de la mutinerie fut le commandant en chef de l’unité, Igor Hryb, 33 ans, qui, selon certaines sources, aurait été exécuté par ses propres hommes après avoir tenté, en vain, de les arrêter.

Au cours des derniers mois de 2024, selon Assembly, au moins trois commandants moscovites auraient été tués par leurs propres soldats [24].

Des Yéménites et des Nord-Coréens sur le front russe

Selon le Financial Times, plusieurs centaines de Yéménites houthistes ont été envoyés sur le front russe en Ukraine. Ils sont employés à creuser des tranchées et construire des abris dans des zones minées. Beaucoup ont été tués.

Trois jours avant l’invasion de l’Ukraine, les houthistes ont reconnu l’indépendance des républiques pro-russe d’Ukraine. Moscou envoie des conseillers militaires à Sanaa et négocie l’expédition d’armes russes. Le Conseil de sécurité de l’ONU a enregistré des tentatives d’introduction clandestine d’armes russes au Yémen. D’après le Wall Street Journal, le notoire trafiquant d’armes Viktor Bout serait l’intermédiaire de ce marché. Le même journal indique que les rebelles yéménites ont utilisé les données des satellites russes transmises par des intermédiaires iraniens pour frapper les navires américains et britanniques en mer Rouge.

Un Yéménite raconte qu’on leur avait promis 10 000 dollars et 2 000 dollars mensuels, un passeport russe et un travail dans une usine de drones. Mais ils ont été envoyés au front après un contrat signé « un pistolet sur la tempe. » La Fédération des migrants yéménites a obtenu le rapatriement d’une douzaine d’entre eux [25].

Sept organisations sud-coréennes de défense des droits humains ont adressé un courrier aux soldats nord-coréens sur le front russe. « Pourquoi pointez-vous vos armes sur le peuple ukrainien innocent, qui lutte pour défendre sa patrie et sa nation contre la domination étrangère ? Quel mal le peuple ukrainien a-t-il fait au peuple coréen ? » Espérant que le message sera lu avec plus de liberté en Russie qu’en Corée du Nord, le porte-parole du collectif souhaite « Je voudrais donner à ces soldats nord-coréens une chance. Si ce courrier peut entraîner une défection massive, cela aidera également le peuple ukrainien à repousser l’offensive russe. »

La lettre se termine ainsi « Il n’est pas encore trop tard, déposez les armes et soyez du côté de la justice [26]. »

Kirill Serebrennikov

Le tournage, à Moscou, du film Limonov, la ballade de Kirill Serebrennikov, d’après le roman d’Emmanuel Carrère, a été interrompu par la guerre d’invasion de l’Ukraine. Il a repris en Europe et sort dans les salles françaises le 4 décembre 2024. Le cinéaste qui, vit en Allemagne et en France, interviewé par Le Monde [27] appelle à la solidarité envers les nombreux opposants russes incarcérés, la metteuse en scène Evguénia Berkovitch, la dramaturge Svetlana Petriichouk, le poète Artiom Kamardin, les trois avocats d’Alexeï Navalny, Alexeï Lipster, Igo Sergounine et Vadim Kobzev, l’historien du stalinisme Iouri Dmitriev, condamné à treize ans de prison, les journalistes Iva Safronov, Antonina Favorskaya, la pédiâtre Nadjeda Bouïanova. « Tous forment la vraie société civile russe […] Nous, en Europe, nous devons les défendre et les sauver. »

« La fine fleur de l’intelligentsia russe est aujourd’hui en Europe. […] Je veux construire des ponts entre eux et les cercles culturels de leurs pays d’accueil. »

Boris Kagarlitsky

Boris Kagarlitsky a été arrêté à Moscou le 25 juillet 2023 après avoir été accusé par le service de sécurité russe FSB de « justifier le terrorisme. » Il a été condamné à cinq ans de prison ferme par un tribunal militaire. Le 14 novembre 2024, il a demandé à ne pas figurer sur une liste de prisonniers à échanger. Il considérerait cela comme un enlèvement et poursuivrait en justice tout gouvernement étranger comme complice du crime s’il essayait de l’emmener contre sa volonté [28].

Menaces nucléaires

« L’ancien ordre nucléaire a vécu. » constate Richard Spencer dans The Sunday Times. Les traités de non-prolifération sont jetés à la poubelle. Des pays de taille moyenne envisagent de se doter de programmes nucléaires [29].

Sergueï Karaganov, président honoraire du présidium du Conseil de la politique étrangère et de défense est réputé proche de Poutine. Selon lui, les Occidentaux et leurs élites se sont habitués à la paix et ne craignent plus la guerre. La peur des armes nucléaires s’est apaisée. Il est nécessaire de la réinstaurer. La menace que des crises dégénèrent en guerre mondiale nucléaire augmente. Il faut réintroduire un fusible nucléaire. Il est nécessaire de conduire à l’escalade vers la dissuasion et l’intimidation pour dégriser les voisins occidentaux qui ont perdu la raison. Toute attaque à grande échelle contre la Fédération de Russie et ses alliés les plus proches, notamment le Bélarus, toute utilisation de la force armée contre ses citoyens pourrait être à l’origine d’une frappe nucléaire [30]. Il est allé jusqu’à préconiser une frappe préventive en Europe pour briser la volonté de l’Occident. Cette « arme divine » pourrait par exemple détruire une ville moyenne polonaise. Poutine l’a d’abord modéré en disant que la doctrine remplissait sa fonction dissuasive [31].

Mais, depuis le début de l’invasion de l’Ukraine, la levée du tabou de la menace des armes nucléaires russes a été franchie plus de cent fois par Vladimir Poutine. Après l’utilisation contre la Russie de missiles occidentaux, il a précisé que la Russie a le droit d’utiliser des armes nucléaires contre des puissances non-nucléaires en guerre avec le soutien de puissances nucléaires [32].

Classé agent de l’étranger, l’institut de sondage Levada continue de publier des études d’opinion indépendantes. 39 % des sondés en Russie estiment justifiée l’utilisation des armes nucléaires en Ukraine et le soutien au pouvoir est au plus haut [33].

Le journal Fakty rappelle qu’en 1991 l’Ukraine indépendante était la troisième puissance nucléaire mondiale en nombre de missiles, d’ogives et de bombardiers. Elle ne maîtrisait pas la décision de leur emploi, détenue par la Russie, et n’avait pas les moyens de les maintenir. Elle a restitué son arsenal à la Russie et ratifié le traité de non-prolifération en échange des garanties de sécurité des autres pays, dont la Fédération de Russie qui a foulé aux pieds cet accord. Des Ukrainiens regrettent à présent ce traité. Sur le site d’information Telegraf, Olena Pareniouk, spécialiste du nucléaire, estime au contraire « Il est très important pour l’Ukraine de ne pas devenir comme la Russie. Nous respectons le droit international [qui] stipule que l’Ukraine a un statut dénucléarisé. Et nous devons le respecter [34]. »

Une des principales banques danoises, la Danske Bank, a annoncé que, onze ans après avoir cessé de placer de l’argent dans les entreprises de fabrication de pièces pour les armes nucléaires, elle a décidé d’autoriser de nouveau ces investissements. L’Australian Institute a révélé que treize des quatorze plus grands fonds d’investissement publics australiens plaçaient l’argent de leurs membres dans l’industrie des armes nucléaires [35].

Adolescents russes « terroristes »

Un reportage de l’édition de 20 heures du journal de France 2 montrait, le 2 décembre 2024, des familles d’adolescents russes lourdement condamnés pour terrorisme. Alors qu’un d’eux a sciemment lancé un cocktail Molotov contre un bureau de recrutement, d’autres ont agi par naïveté ou sous l’emprise d’un manipulateur.

Il y aurait plus d’une centaine de mineurs accusés pour des sabotages. Pavel Bugai, 18 ans, a contracté la tuberculose en prison [36].

Contournements d’embargo

Le lendemain de ce reportage, l’édition de 20 heures du journal de la même chaîne relatait l’utilisation par la Russie de composants électroniques fabriqués près de Lyon par Elistair. Tony Fortin, de l’Observatoire des armements, a démontré le transfert de Chine en Russie de ce matériel.

Comme l’ont établi Elie Guckert, Ariane Lavrilleux, Geoffrey Livolsi et Mathias Destal, la France a délivré au moins 76 licences d’exportation de matériel de guerre à la Russie depuis 2015. Montant total de ces contrats : 152 millions d’euros, comme l’indique le dernier rapport au Parlement sur les exportations d’armement, sans toutefois préciser le type de matériel livré [37].

L’Organisation des Étudiant·es Ingénieur·es de l’INP de Grenoble réclame la fin des partenariats entre leur école et l’industrie de l’armement. Elle dénonce les crimes pour lesquels la Cour pénale internationale a lancé un mandat d’arrêt contre Benyamin Netanyahou, premier ministre israélien, et Yoav Gallant, ministre israélien de la défense. Elle écrit :

« Les partenaires industriels de Grenoble INP façonnent nos formations, orientent notre recherche et nous sont présentés dès la première année de notre cursus ingénieur comme nos futurs employeurs. Les activités de certaines de ces entreprises dans le domaine de l’armement sont souvent passées sous le radar lors des présentations et des forums au profit d’autres secteurs comme l’aérospatial ou le médical. Aucune ONG, association ou collectif ne nous présente les violations des droits humains ou du droit international auxquelles participent les entreprises. Nous ne pouvons plus tolérer ce manque de transparence. Conserver des liens si étroits avec ces entreprises, sous prétexte que les projets que nous avons en commun n’ont à priori pas de lien avec l’armement, n’est pas une solution satisfaisante. À chaque nouvelle atrocité, il semblerait que nous redécouvrions l’implication de ces entreprises dans des conflits meurtriers. Or, nous estimons que collaborer avec ces entreprises revient à soutenir leurs actions à l’international. […]
Nous pouvons également citer Lynred, […] qui a fourni des capteurs pour l’armée russe de Vladimir Poutine, ou encore Thalès pour sa coopération avec l’Arabie Saoudite. Les liens entre nos écoles et ces entreprises sont multiples malgré un manque de transparence. […]
En 2022, lors de l’agression russe contre le peuple ukrainien, la question des partenariats avec le complexe militaro-industriel a déjà été portée aux oreilles de notre administration. À l’époque, les prises de contacts à ce sujet sont restées sans réponse, malgré une majorité relative d’étudiant.e.s en faveur de l’arrêt de ces partenariats. […]
Nous exigeons une communication claire de la part des entreprises sur leur implication dans les secteurs de l’armement, par exemple que les entreprises qui se présentent sur nos forums exposent la part de leur chiffre d’affaires reposant sur l’armement [38]. »

Déréhabilitation

En Russie, la fermeture du musée du GOULAG sous un prétexte fallacieux, la dissolution de Memorial qui documentait les crimes soviétiques et les nombreux monuments élevés à Staline témoignent de la volonté du Kremlin de susciter un nouveau culte au tyran. Le bureau des procureurs a « déréhabilité » 4 000 victimes de la répression stalinienne qui sont associés aux « nazis et traîtres à la patrie » adversaires de Poutine et de sa guerre [39].

Récriminations russes

Des vidéos de soldats s’adressent à Poutine pour se plaindre de pertes injustifiées, pour refuser de combattre avec des fusils contre des chars et exprimer que « d’une manière générale, c’est le bordel complet et les hommes meurent. » Des épouses et des mères de soldats demandent que leurs proches soient épargnés ou que les primes promises soient versées. Des habitants de la ville annexée de Marioupol demandent à être relogés dignement. Des villageois de la région de Koursk occupée par les troupes ukrainiennes se plaignent de vivre un enfer depuis trois mois [40].

Géorgie

Fin novembre, le Premier ministre Irakli Kobakhidze a déclaré que la Géorgie reporterait les négociations d’adhésion à l’Union européenne jusqu’à la fin 2028. Depuis des manifestations quotidiennes de protestation ont lieu. Des opposants russes exilés dans le pays s’y associent. 300 personnes ont été arrêtées dont au moins huit russes. L’un d’eux a été expulsé en Arménie.

Le Patriarcat orthodoxe géorgien est très indulgent envers le régime qui a falsifié les élections, il le justifie par : « Tout sur terre se passe selon la volonté de Dieu. » Pourtant, son service de presse a déclaré « Nous avons observé des actions agressives de la part des forces de l’ordre. Ils ont attaqué physiquement les participants à la manifestation, des personnes de tous âges, y compris des journalistes [41]. »

Un militant russe intervient grâce à ses compétences paramédicales pour secourir les manifestants et même les policiers. Il agit prudemment pour éviter l’arrestation et l’expulsion. « Et moi, Russe, je suis également le bienvenu ici. », se réjouit-il.

Marina a quitté la Russie pour la Géorgie à l’automne 2022 par crainte d’être persécutée en raison de sa position anti-guerre. Dans les manifestations, elle apporte des produits pour nettoyer les yeux aux victimes des gaz.

Un autre a quitté la Russie pour la Géorgie au printemps 2022 en désaccord avec l’invasion de l’Ukraine. Il apporte aux manifestants des respirateurs et des lunettes de protection, du thé et des biscuits. Au début, il voulait acheter de l’eau bouillante aux restaurants qui l’offraient gratuitement. Comme les autres, en tant qu’étranger, il se garde de proclamer des slogans. Sur sa bannière, il a écrit « Thé chaud ». « Je pense que mon désir d’aider les manifestants est également influencé par mon expérience personnelle : lorsque nous participions à des rassemblements en Russie, la police nous arrêtait de la même manière. En ce sens, ceux qui manifestent en Géorgie sont mes amis. […] J’ai été surpris que des gens viennent vers moi et me remercient en russe [42]. »

Russie-Libertés et Melograno

Le 12 décembre 2024, à l’Espace Libertés I Reforum Space, 16 rue Oberkampf, Paris, les associations Russie-Libertés et Melograno vous invitent à une soirée de lettres aux prisonniers politiques russes, dédiée aux accusés de « l’affaire Maïakovski », les poètes Artem Kamardine et Egor Shtovba, condamnés pour avoir lu et participé à des lectures de poèmes contre la guerre.

Programme de la soirée :

  • Projection d’un extrait du reportage « Russie : la traque des derniers résistants », réalisé pour Ligne Rouge de BFM TV par Paul Gogo, Alexandra Dalsbaek, Sandra Boulanger et Alexandre Funel.
  • Discussion sur « l’affaire Maïakovski », symbole de l’absurdité et de la brutalité de la justice russe actuelle.
  • Écriture de lettres et de cartes postales pour apporter un soutien moral aux prisonniers politiques en Russie.

Inscription obligatoire

Grâce à son plaidoyer persistant et déterminé, Russie-Libertés a pu prouver aux autorités françaises que les déserteurs sont parmi les acteurs clés de la résistance au régime de Poutine et à la guerre. Offrir l’asile aux déserteurs ne consiste pas seulement à sauver des vies humaines. Cela affaiblit également l’armée de Poutine. L’association a facilité l’arrivée de 10 personnes en France depuis le Kazakhstan. Elle accueillera prochainement d’autres personnes fuyant l’armée russe et la guerre. Chacune d’entre elles est poursuivie pénalement pour désertion. Elle a besoin de votre aide pour financer leurs billets, un logement temporaire et les premières dépenses nécessaires, en attendant qu’elles puissent bénéficier du soutien des services sociaux français.

Recrutements pour le front russe

Prisonniers

En Russie, il est désormais possible d’aller au front pour bénéficier d’une libération anticipée à n’importe quel stade d’une procédure pénale, de l’enquête à l’exécution de la sentence. La première étape fonctionne déjà au stade de l’accusation, lorsque l’enquêteur intimide la personne impliquée dans l’affaire pénale et fait miroiter la solde et le retour en héros. Un formulaire standard contenant des informations sur le droit de conclure un contrat est désormais inclus dans les documents de toute affaire. À l’été 2023, une loi a été adoptée permettant d’exonérer officiellement les prisonniers de toute responsabilité pénale en cas de signature d’un contrat avec le ministère de la Défense. Un avocat raconte : « Dans la colonie que j’ai visitée, depuis 2023, des véhicules du bureau d’enregistrement et d’enrôlement militaire étaient constamment en service à l’entrée. »

Une avocate évoque un de ses clients qui a dissuadé des codétenus de signer un contrat pour sauver leurs vies. Un inculpé d’incendie criminel d’un bureau d’enregistrement et d’enrôlement militaire a logiquement refusé le contrat.

Les contrats sont d’un an et souvent proposés illégalement hors de la présence d’un avocat. Personne n’explique alors aux candidats que ce délai sera automatiquement prolongé dans les conditions du décret présidentiel jamais annulé sur la « mobilisation partielle. » Certains blessés sortent de l’hôpital croyant leur contrat terminé et deviennent déserteurs.

Il est difficile et parfois dangereux pour un avocat de dissuader ses clients de conclure un contrat, ce qui pourrait lui valoir une inculpation pour discrédit de l’armée [43].

Yéménites

Des « centaines d’hommes yéménites » ont été recrutés de force par l’armée russe, selon le quotidien britannique économique Financial Times, au moyen d’« une opération de trafic clandestin [qui] met en évidence les liens croissants entre Moscou et le groupe rebelle houthiste [44]. »

Ukraine

Syndicalisme, droits des soldats

Depuis le début de la guerre, le gouvernement ukrainien mène une politique néo-libérale qui s’attaque aux droits des travailleurs, les privant de congés et retardant de plusieurs mois leurs salaires. À lhôpital d’Ivano-Frankivsk, 240 travailleurs de santé ont été limogés. Après de nombreux procès gagnés par des salariés, le ministre de la Justice a dit redouter que cela entrave le développement des entreprises. Des mobilisations ont lieu pour la défense des services publics, pour la démobilisation des soldats épuisés et pour le soutien aux prisonniers de guerre. Le syndicat du personnel soignant revendique l’élection des directeurs d’hôpitaux. La perte des droits sociaux, la flambée des prix, les maigres salaires, l’austérité sociale, la restriction des négociations collectives, l’augmentation des impôts sur les revenus modestes et moyens et la poursuite de la corruption, même dans le domaine de la défense expliquent partiellement la désaffection pour la mobilisation [45]. De janvier 2024 à septembre, 35 307 affaires pénales de désertion ont été enregistrées. De janvier à septembre 2023, il y en a eu 11 625, soit trois fois moins. Pour l’ensemble de l’année 2023, ces cas s’élevaient à 17 658. Les cas signalés d’évasion ont triplé depuis 2023, et les sondages montrent régulièrement que près de la moitié des personnes interrogées considèrent cette situation rationnelle. La brutalité et l’impunité des officiers de police judiciaire, qui font pression sur les hommes dans les rues, ne font qu’exacerber le problème. Les recrues non motivées, non entraînées, voire inaptes, mettent en danger les autres, ce qui rend discutable le résultat d’une coercition accrue [46].

Une centaine de soldats ukrainiens de la 123ème Brigade de défense territoriale (TrO) ont organisé à Voznessensk, dans la région de Mykolaïv, un rassemblement qui témoigne de la tension croissante dans les rangs des forces armées. Les combattants protestent contre le manque d’entraînement et d’armes, ce qui leur fait craindre une insuffisance de sécurité et d’efficacité pour leur participation aux opérations [47]. Le lendemain, des proches de soldats ont manifesté à Kiev. « Nous ne savons pas quand ils reviendront et eux non plus. Ils sont de moins en moins nombreux chaque jour. Et nous voulons avoir un espoir que nos proches pourront revenir vivants du front. » a déclaré une femme de soldat [48].

Budget de la défense

Le président ukrainien a signé la loi sur le budget 2025 dont 60 % des dépenses, seront consacrés à la défense et la sécurité pour faire face à l’invasion russe, ce qui inclut la production d’armement et les salaires des soldats [49]. Le 1er décembre 2024, pour financer les forces armées ukrainiennes, le prélèvement militaire est passé 1,5 % à 5 %. 23 % seront retenus sur les salaires (18 % d’impôt sur le revenu + 5 %).

Maksym Butkevych

Le soldat Maksym Butkevych a été libéré en octobre 2024. Engagé volontaire, libertaire et chrétien, internationaliste et ukrainien, il écrivait : « J’ai été antimilitariste tout au long de ma vie consciente et je le reste par conviction. Mais aujourd’hui, je me sens au bon endroit [50]. »

Corps restitués

Les autorités russes ont restitué les corps de 502 soldats ukrainiens tués au combat [51].

Déserteurs

Selon le procureur général, plus de 100 000 soldats ont été inculpés en vertu des lois ukrainiennes sur la désertion depuis l’invasion du pays par la Russie en 2022. Près de la moitié d’entre eux ont déserté au cours de la seule année 2023, après que Kiev a lancé une campagne de mobilisation agressive et controversée qui, de l’aveu même des responsables gouvernementaux et des commandants militaires, a largement échoué. Une vidéo montre un recrutement musclé pendant un concert. Des unités entières ont abandonné leurs postes, laissant les lignes de défense vulnérables et accélérant les pertes territoriales, selon des commandants militaires et des soldats. Certains prennent un congé médical et ne reviennent jamais, hantés par les traumatismes de la guerre et démoralisés par les sombres perspectives de victoire. L’un d’eux se confie : « Imaginez que vous êtes assis sous un feu nourri et que, de leur côté (russe), cinquante obus viennent vers vous, alors que de notre côté, il n’y en a qu’un seul. Vous voyez alors vos amis se faire déchiqueter et vous réalisez qu’à tout moment, cela peut vous arriver. » Un officier comprend « À ce stade, je ne condamne aucun des soldats de mon bataillon et des autres. Parce que tout le monde est vraiment fatigué. » « Les gens ne peuvent pas faire face psychologiquement à la situation dans laquelle ils se trouvent, et ils ne reçoivent pas d’aide psychologique », plaide l’avocate Tetyana Ivanova.

Le Financial Times cite un incident avec des centaines de fantassins de la 123ème brigade des forces armées ukrainiennes, qui ont quitté fin octobre leurs positions à Ugledar, dans la région de Donetsk. Les militaires sont rentrés chez eux dans la région de Nikolaev et ont commencé à exiger publiquement davantage d’armes, ainsi que des rotations au front. Selon les autorités locales, certains déserteurs sont depuis revenus au combat, d’autres ont fui et plusieurs personnes sont en garde à vue. En moyenne, douze militaires ukrainiens s’échappent chaque mois des exercices militaires en Pologne, a déclaré aux journalistes un représentant des services spéciaux polonais sous couvert d’anonymat [52].

D’autres se heurtent à leurs commandants et refusent d’exécuter les ordres, parfois en plein milieu des échanges de tirs. Selon un législateur, l’armée ukrainienne a enregistré un déficit de 4 000 soldats sur le front en septembre, principalement en raison des décès, des blessures et des désertions. La plupart des déserteurs sont des recrues récentes. » Environ 20 % des soldats manquant à l’appel dans certaines compagnies ont déserté [53].

C’est une des raisons de la demande de Washington à Kiev d’abaisser l’âge de la mobilisation de 25 à 18 ans [54]. Zelensky a répliqué : « Le problème de l’Ukraine n’est pas le nombre de militaires sur le front, mais la fourniture insuffisante d’armes et d’équipements aux brigades déjà constituées des forces armées ukrainiennes [55]. » Il a aussi laissé entendre qu’il était disposé à attendre avant de récupérer les zones occupées par l’armée russe si un accord pouvait offrir la sécurité au reste de l’Ukraine et mettre fin aux combats [56].

Salon du livre de Francfort

Au Salon du livre de Francfort, la protestation d’éditeurs ukrainiens a obtenu la fermeture du stand d’un éditeur russe. Les Ukrainiens se sont installés sur le stand russe avec des affiches « La Russie tue des écrivains, des journalistes et des enfants » [57].

Alexeï Gorinov

En juillet 2022, Alexeï Gorinov a été le premier condamné pour avoir dénoncé l’agression militaire en Ukraine au cours d’une réunion des députés municipaux à Moscou. Il subit une peine de sept ans de prison. À l’automne 2023, une autre affaire pénale a été ouverte contre lui, pour justification du terrorisme en raison de conversations avec des compagnons de cellule.

Texte de la pancarte : "Arrêtez de tuer. Arrêtons la guerre".

Le 27 novembre 2024, le tribunal a interrogé deux témoins à charge, un voleur et un violeur détenus avec Gorinov à l’hôpital de la prison. Ils ont déclaré, dans les mêmes termes, à la virgule près, que Gorinov aurait justifié le bombardement du pont de Crimée, ainsi que les activités du bataillon Azov et de l’unité des forces spéciales Kraken, accusés de terrorisme et d’idéologie d’extrême droite. D’après le journaliste Dmitri Muratov, des prisonniers provocateurs avec des microphones cachés ont été spécialement placés dans la cellule d’Alexeï Gorinov.

Gravement malade, Gorinov a été privé de soins. La défense a enfin réussi à le faire examiner dans un hôpital civil [58].

Au tribunal, il a appelé à « arrêter le massacre sanglant et inutile ». « Ma culpabilité réside dans le fait que, en tant que citoyen de mon pays, j’ai permis cette guerre et n’ai pas su l’arrêter », a-t-il confessé.

Le 29 novembre 2024, il a été condamné à trois ans supplémentaires de prison. « Je suis pour la paix, mais vous aimez la guerre », a-t-il répliqué au juge.

Le même jour, les agences russes ont rapporté, citant les services de sécurité (FSB), les condamnations de quatre habitants de l’Extrême-Orient russe à des peines allant de six à dix-sept ans de prison pour avoir tenté d’incendier un bureau de recrutement de l’armée russe [59].

Sergueï Savchenko

Le Russe Sergueï Savchenko (pseudonyme par sécurité), 33 ans, a été mobilisé à l’automne 2022. Au bureau d’enregistrement et d’enrôlement militaire, il a déclaré qu’il ne tirerait pas sur les gens. Il a réussi à servir comme infirmier anesthésiste dans un hôpital de campagne, en tant qu’officier d’évacuation des blessés du champ de bataille. Il a reçu deux médailles pour ses mérites en médecine militaire.

À son retour au front, Savchenko a été nommé commandant de peloton et le nouveau commandement du régiment a ordonné de prendre d’assaut les bastions des forces armées ukrainiennes sans préparation d’artillerie ni reconnaissance. Il a refusé d’exécuter l’ordre. « J’ai dit que je ne donnerais pas l’ordre de tirer sur qui que ce soit. » Il a été emmené dans le sous-sol d’une ancienne douane ukrainienne, une prison illégale pour les militaires qui refusent d’exécuter les ordres. Environ 400 personnes étaient gardées au sous-sol en même temps. Il y a passé 72 jours de torture. « Ils m’ont électrocuté, aspergé d’eau froide pendant une heure et demie à deux heures, directement au jet d’eau, ils m’ont juste battu. La tâche de cette institution est simplement de briser une personne pour qu’elle accepte tout. » L’un des refuzniks a tenté de s’échapper pour ne pas se retrouver dans le groupe d’assaut, mais s’est perdu et a eu les jambes gelées qui, selon Savchenko, ont ensuite dû être amputées.

La 25ème brigade de fusiliers motorisés a tenté de prendre le village de Sinkovka. Tout le monde a été jeté à l’assaut - soldats sous contrat, conscrits, prisonniers et handicapés. Savchenko affirme que même à ce moment-là, il a continué à répéter qu’il ne prendrait pas les armes et il en a informé le responsable politique. Sergeï a été attaché à un arbre pour la nuit. On lui a proposé d’évacuer les blessés de la ligne de contact. Pour cela, il devait payer 100 000 roubles. Savchenko, avec le téléphone de son interlocuteur, a demandé à sa femme de payer le pot-de-vin, une pratique fréquente au front. Sous le feu adverse, il a ramené quarante personnes dont treize ont survécu. Blessé, le commandant a refusé qu’il soit hospitalisé, prétextant que, comme médecin, il pouvait se soigner tout seul. Le chef du service médical lui a extorqué un nouveau pot-de-vin pour ses soins mais il a ensuite annulé l’accord.

Pendant que sa femme multipliait les démarches pour le retrouver, il a été enfermé dans une cage de la taille d’un petit enclos pour chien, dans laquelle il ne pouvait être qu’à moitié courbé. Les soldats qui gardaient la cage ont d’abord pris Savchenko pour un prisonnier de guerre ukrainien, mais après avoir appris qu’il était russe, ils lui ont apporté du pain et une couverture la nuit.

Après des menaces, il signe un document duquel résulte un rapport selon lequel « Il a été établi que le sous-lieutenant Savchenko n’a aucune plainte contre les responsables du ministère de la Défense, ne confirme pas les faits exposés dans [l’] appel [de sa femme] et demande que les activités de vérification à son encontre soient arrêtées. »

En septembre, il est emmené à Lougansk où, douze heures par jour, sept jours sur sept, il accompli un travail administratif. Il a appris qu’il était porté disparu depuis le 29 décembre 2023, jour de son arrivée à la 25ème brigade de fusiliers motorisés. Le colonel Alexeï Ksenofontov a reçu le titre de Héros de la Russie pour un assaut sans pertes. « Cette racaille recevra alors le grade de général de division, prendra sa retraite. […] Et à cause de lui, pendant ce temps, 5 000 garçons gisaient là, dans les buissons », fulmine Savchenko.

Il décide de s’enfuir et retrouve sa famille. Puis quitte la Russie grâce à l’organisation Traverser la forêt. En 2024, il n’a pas reçu un kopek du ministère de la Défense et a dépensé un demi-million en pots-de-vin. Le fugitif n’a pas d’argent pour se faire soigner à l’étranger et enlever l’éclat logé douloureusement dans sa main [60].

Daria Kozyreva

Le tribunal de Saint-Pétersbourg continue d’examiner l’affaire de « discrédit » de l’armée russe contre Daria Kozyreva, 19 ans. Elle est en détention provisoire depuis neuf mois en raison d’un entretien avec Sever.Realii, et d’un tract contenant des poèmes de Taras Shevchenko, qu’elle a collé sur le monument au poète ukrainien à l’occasion de l’anniversaire de la guerre.

Elle a déclaré que Taras Shevchenko est son poète préféré et que ses poèmes ne peuvent pas « discréditer » l’armée de la Fédération de Russie, puisqu’il a vécu à une époque où la Fédération de Russie n’existait pas encore. »

Le procureur interroge le policier qui a arrêté la jeune femme pour savoir s’il était écrit « Liberté pour l’Ukraine ». « L’Ukraine est déjà libre, Monsieur le Procureur », souligne Daria en souriant [61].

Mines

Une discussion sérieuse pour autoriser les mines antipersonnel, bannies par la convention d’Ottawa, est en cours en Finlande, a déclaré, le 27 novembre 2024, le Premier ministre finlandais, Petteri Orpo, devant ses collègues nordiques et baltes lors d’une conférence de presse en Suède. Le Premier ministre estonien, Kristen Michal, a informé, à la même occasion, que son pays suivrait l’exemple finlandais [62].

Et Dieu… créa la Femme en résistance

« Et Dieu… créa la Femme en résistance » est un projet documentaire féministe, anti-Poutine et anti-guerre de Margarita Rybina, réalisatrice de cinéma documentaire, membre du Conseil de Russie-Libertés.

« Aujourd’hui, le féminisme c’est une vraie arme contre Poutine. Les femmes russes qui se battent pour leurs droits et libertés, s’opposent en même temps au régime inhumain, archaïque et patriarcal en donnant de l’espoir pour un avenir meilleur à toute la société russe. La résistance anti-guerre et anti-régime en Russie a, sans doute, le visage féminin. La magnifique Russie du futur sera féministe. »

Répression

Le bilan d’OVD Info fait état, en Russie, de 2 934 accusés dans des affaires pénales à motivation politique. Il annonce les procès prochains de 292 personnes. Le 19 novembre 2024, il y avait eu depuis le début de l’année 1 178 arrestations lors de rassemblements publics. Du début de la guerre jusqu’à la même date, 1 095 personnes ont été impliquées dans des affaires pénales antiguerre [63]. 214 personnes sont accusées d’incitation au terrorisme ou de justification du terrorisme. 209 sont prévenues de discréditation des forces armées, des organismes gouvernementaux ou des mercenaires [64].

Le chanteur Eduard Charlotte est poursuivi pour réhabilitation du nazisme, incitation à la haine et à l’inimitié, violation du droit à la liberté de conscience et de religion et destruction d’un document officiel. Dans une vidéo, il a insulté le patriarche Kirill, en clouant sur le crucifix une photo du chef de l’Église orthodoxe russe et sa carte d’identité militaire. Une autre vidéo montrait Charlotte brûlant un passeport russe [65].

L’ancien pilote Igor Pokusin est décédé en 2024 au centre de détention provisoire d’Abakan. Au printemps 2022, des manifestants d’origine ukrainienne ont versé de la peinture sur une banderole avec la lettre Z au centre d’Abakan et ont écrit un slogan sur le mur du musée d’histoire locale. Deux mois plus tard, Pokusin fut arrêté à Krasnoïarsk et torturé pour lui faire avouer avoir tenté de partir pour l’Ukraine et de rejoindre les forces armées ukrainiennes.

Marina Lolokhaeva

Marina Lolokhaeva a été condamnée à une amende de 40 000 roubles en raison de deux commentaires dans le chat du projet « Je veux vivre ». Elle avait notamment écrit « Je ne suis pas du tout fière de la Fédération de Russie, il n’y a pas de quoi être fière. Et maintenant, il y a une honte qui durera mille ans, et rien ne pourra l’effacer. » En outre elle avait parlé de guerre au lieu d’opération militaire spéciale. Quelques jours plus tard, une amende de 30 000 roubles lui a été infligée pour une image disant « Non à la guerre » sur fond de paume ensanglantée [66].

Evgeny Sandulsky

Le tribunal militaire de la garnison d’Ekaterinbourg a condamné Evgeny Sandulsky, militaire russe de 37 ans, accusé de désertion, à 10 ans de prison dans une colonie à régime général. C’est la peine la plus sévère pour ce délit à ce jour [67].

Forum des États libres de l’après-Russie

La Cour suprême a reconnu le Forum des États libres de l’après-Russie comme terroriste. Les participants du forum prônent « la décolonisation de la soi-disant Fédération de Russie » et la création de « 41 États indépendants au lieu d’un empire fou. » La Cour a désigné la Fondation Free Yakutia, le Parti républicain balte, le mouvement Ingria, le Congrès des peuples du Caucase du Nord et la Confédération d’Extrême-Orient [68].

Sergueï Loukachevski

Un tribunal de Nijni Novgorod a condamné par contumace Sergueï Loukachevski, ancien directeur du Centre Sakharov, à 8 ans de prison pour « fausses nouvelles » concernant l’armée russe. Une dénonciation contre lui a été rédigée par un étudiant de l’Université d’État de Nijni Novgorod, militant d’une organisation patriotique qui organise des rencontres entre étudiants universitaires et soldats revenant du front. Un autre étudiant qui a assisté à de telles réunions a témoigné à charge.

Les patriotes russes récompensés

Alors que l’opposition est de plus en plus sévèrement réprimée, Vladimir Poutine répète que les héros de l’opération militaire spéciale seront récompensés. La propagande fait grand cas de Maria Kostiouk, mère d’un soldat mort au front et promue gouverneure de région. Poutine l’a remerciée « d’avoir élevé un véritable guerrier russe. » En réalité la nouvelle gouverneure a les compétences et l’expérience nécessaires pour occuper ce poste et, surtout, elle est une fidèle du parti poutinien. Les juges qui condamnent les opposants, et les membres du FSB qui servent dans le Donbass sont promus [69].

Pillage russe en Russie

En septembre, les habitants qui avaient fui l’offensive des forces armées ukrainiennes ont commencé à retourner dans les villages frontaliers de la région de Koursk et ont constaté que les maisons et les magasins abandonnés avaient été pillés et saccagés. Il n’y a jamais eu de soldats ukrainiens dans leurs villages : l’armée russe y assurait la défense. Les autorités ont d’abord qualifié les informations faisant état de pillages de propagande de l’ennemi, mais après l’indignation massive des habitants de Koursk, elles ont été forcées d’admettre le problème. Les réfugiés exigent de « mettre fin à cette foutue guerre », et le gouverneur limoge les chefs de district pour échec en matière d’évacuation [70].

Les chaînes locales Telegram ont publié une vidéo dans laquelle deux hommes en tenue de camouflage brisent des vitres, cassent des vitrines et sortent des marchandises d’un magasin.

Chair à canon

Une vidéo de LCI tend à prouver que les soldats russes auraient pour ordre d’avancer coûte que coûte, notamment dans la région de Koursk dans le but de récupérer la poche prise par les Ukrainiens en été 2024. Ils sont victimes des drones ukrainiens qui les frappent. Un soldat français engagé, côté ukrainien, dans la Légion internationale pense que des soldats russes sont « abattus » par leurs chefs s’ils n’avancent pas.

Mines antipersonnel

Le secrétaire à la défense américain a confirmé que les États-Unis vont fournir à l’Ukraine des mines antipersonnel non persistantes, c’est-à-dire équipées d’un dispositif d’autodestruction ou d’autodésactivation lors de l’épuisement de la batterie. Handicap International conteste l’efficacité du dispositif. Sous Barack Obama, les États-Unis avaient décidé de ne pas prolonger ou modifier la durée de vie des batteries de ces mines qui devaient expirer au début des années 2030 [71].

La Campagne internationale pour interdire les mines (ICBL) a dénoncé la décision « désastreuse » des États-Unis. « L’Ukraine doit affirmer clairement qu’elle ne peut pas accepter, et qu’elle n’acceptera pas ces armes. »

84 % des victimes des mines antipersonnel dans le monde sont des civils, dont 35 % sont des enfants, affirme l’Observatoire des mines dans un rapport publié peu avant la décision américaine.

L’Ukraine manque de démineurs. Leur tâche durera plusieurs décennies et coûtera plusieurs dizaines de milliards d’euros. Les États-Unis ont fourni à l’Ukraine une faible proportion de cette somme dans ce but [72].

Selon la ministre ukrainienne de la protection de l’environnement et des ressources naturelles à la COP 29 de Bakou, en novembre 2024, la guerre a provoqué 71 milliards de dollars de dégâts environnementaux et entraîné une augmentation massive des émissions de gaz à effet de serre auxquelles il faudra ajouter celles de la reconstruction du pays [73].

Nadejda Bouïanova

La justice russe a condamné à cinq ans et demi de prison ferme Nadejda Bouïanova, une pédiatre de Moscou. La mère d’un de ses patients et compagne d’un soldat porté disparu au front en Ukraine l’a accusée d’avoir critiqué, lors d’une consultation, l’invasion de l’Ukraine. La pédiatre a ensuite été licenciée [74].

Au tribunal l’accusée a déclaré « Je suis impliquée dans trois peuples slaves : russe, biélorusse, ukrainien. Que dois-je faire, quel choix dois-je faire ? J’ai étudié, travaillé, communiqué et me suis lié d’amitié avec des Ukrainiens. […] Comment pouvez-vous dire de la nation ukrainienne tout entière qu’elle déteste le monde russe ? […] Je tiens à dire que je n’admets pas ma culpabilité et que je me considère innocente. Je demande au tribunal de m’acquitter. » Le verdict a été suivi de cris de protestations du public [75].

Alexeï Navalny

Un mémorial dédié à l’homme politique Alexeï Navalny a été inauguré en présence de sa veuve, à Lisbonne. Un monument avec l’inscription « N’abandonnez pas » en trois langues a été installé à 100 mètres du bâtiment de l’ambassade de Russie. Le mémorial a été érigé par l’Associação de russos livres (Association des Russes libres au Portugal), un mouvement de Russes qui s’opposent à Vladimir Poutine et à la guerre avec l’Ukraine [76].

Gloire au violeur assassin

L’administration de la ville de Chebarkul a présenté ses excuses pour la photographie d’un meurtrier reconnu coupable qui a été placée sur une plaque à la mémoire des militaires russes tués pendant la guerre en Ukraine.

La veuve d’un autre militaire s’est indignée « Ce Sinitsyn a tué une femme ici, deux enfants se sont retrouvés sans mère. Il l’a tuée brutalement, il l’a violée, il lui a arraché les yeux. C’est un monstre [77]. »

Incendie d’un bureau d’enrôlement militaire

Sergueï Andreev, opérateur de camion-grue, a été condamné à la très lourde sanction de 24 ans de prison et à une amende de 1,2 million de roubles pour des dommages de 41 000 roubles. Il a été déclaré coupable de trahison, de terrorisme, de participation à une communauté terroriste et de fabrication, stockage, port et transport illégaux d’explosifs et de leurs composants. Il avait tenté d’incendier un bâtiment du bureau d’enregistrement et d’enrôlement militaire. Il n’a blessé personne ni causé de graves dégâts. D’après le rapport d’expert, il n’a utilisé que des produits de feux d’artifice [78].

Cette maudite guerre

Plus de quarante habitants du village d’Olgovka, district de Korenevsky, région de Koursk, qui se trouve dans une zone de combat depuis août 2024, ont enregistré un message vidéo adressé au président russe Vladimir Poutine. « Cela fait trois mois que nous sommes en enfer, vers où devons-nous nous tourner, où pouvons-nous trouver le salut ? Nous vous demandons de mettre fin à cette maudite guerre, qui a coûté de nombreuses vies innocentes. Nous voulons que nos enfants voient un ciel paisible et n’écoutent pas le signal de danger des missiles. Examinez cette situation et écoutez les frontaliers. Nous ne supportons pas tout cela de notre plein gré. »

Insoumission

Les insoumis russes encourent une peine de prison de deux ans. Pourtant, selon les statistiques judiciaires que les avocats d’Appel à la conscience ont recueillies, 431 insoumis ont été poursuivis, trois ont été acquittés et un seul a été condamné à une peine avec sursis. La plupart des condamnés l’ont été à des amendes allant jusqu’à 100 000 roubles [79].

Andreï Kolesnikov

Andreï Kolesnikov est un politologue russe et éditorialiste de Novaïa Gazeta. Il est considéré par la Russie comme « agent de l’étranger ».

Selon lui, une partie des Russes opposés au Kremlin et à sa guerre est partie en exil. Les plus courageux sont restés en Russie. Ils représentent de15 à 20 % de la population. La marche de Berlin enverra un message clair au Kremlin : tous les Russes ne pensent pas comme Poutine. C’est aussi un signal envoyé à l’Ouest : nous existons toujours nous sommes contre Poutine ; nous représentons l’autre Russie [80].

Il est interrogé sur l’état d’esprit des Russes. « Lorsqu’il est impossible de comprendre pleinement les raisons des événements, les gens se referment sur eux-mêmes : je ne vois rien, je n’entends rien, ma tâche est de survivre, je ne veux rien savoir, ceux qui sont au sommet savent ce qu’il faut faire, nous ne voulons pas la guerre mais nous sommes attaqués… »

Il faut distinguer « ceux qui sont pour Poutine et ceux qui sont contre, ceux qui risquent la répression, ceux qui sont horrifiés mais silencieux parce qu’ils craignent pour leur famille, ceux qui partent parce qu’ils ne veulent pas être emprisonnés… »

Pour Kolesnikov, les libéraux russes qui restent en Russie sont traités comme des antipatriotes par les soutiens de Poutine et, à l’Ouest, les pays se ferment à tous les Russes. Tout cela sert Poutine, qui peut dire que ce n’est pas la Russie qui s’isole de l’Occident, mais l’Occident qui isole la Russie [81].

En 2023, la France a accordé 116 000 visas, parfois de courte durée, à des citoyens russes. 1 700 demandes d’asile ont été déposées dont un quart a débouché sur le statut de réfugié.

Vadislav Inozemstev, dans L’Exode du siècle (IFRI, juin 2024) à propos des relokanty (les relocalisés russes), évalue que 86 % ont moins de 45 ans et 80 % ont suivi des études supérieures. Il estime qu’entraver la migration russe comme le font les Européens est une grave erreur de calcul de la classe politique [82].

The Bachelor

En Ukraine, la télévision diffuse à nouveau l’émission The Bachelor qui a été interrompue par la guerre. Un candidat très glamour de cette émission de séduction en télé-réalité est un soldat amputé des deux jambes et muni de prothèses. Très populaire, il souhaite utiliser sa participation à l’émission pour sensibiliser les gens aux difficultés auxquelles sont confrontés les Ukrainiens handicapés. On estime que des dizaines de milliers de blessés de guerre ont perdu au moins un membre [83].

Manifestations à Berlin et ailleurs

Le 17 novembre 2024, Ioulia Navalnaïa, Ilia Iachine et Vladimir Kara-Mourza, manifestant ensemble à Berlin avec, selon la police, 1 800 personnes [84], espèrent afficher leur unité, et mobiliser le vivier des dizaines de milliers de Russes ayant quitté leur pays depuis 2022, notamment pour échapper à la mobilisation militaire. Ioulia Navalnaïa veut montrer « qu’il existe une Russie antimilitariste et libre. »

Ilia Iachine, qui a récemment terminé une tournée européenne à la rencontre des exilés, veut tenter de mobiliser cette diaspora autour d’une « initiative anti-guerre et anti-Poutine » à même d’inspirer leurs compatriotes restés au pays. À propos des divisions de l’opposition, il a admis, lors d’une interview au Moscow Times début novembre « Il est clair que les conflits sont si profonds (...) qu’il est peu probable aujourd’hui de réconcilier tout le monde [85]. »

Ioulia Navalnaïa, Ilia Iachine et Vladimir Kara-Mourza au premier rang de la manifestation ; Photo Evgeny Feldman / Meduza

Bien que la marche vise à protester contre la guerre, l’événement a été durement critiqué par l’ambassadeur ukrainien en Allemagne, Oleksiï Makeïev, qui a moqué dans les colonnes du Zeit une « promenade sans dignité et sans conséquence ». Estimant que les trois opposants n’en font pas assez pour soutenir l’Ukraine et pour appeler leurs concitoyens à protester, il a fustigé une manifestation qui n’est que l’illustration de la « faiblesse » du mouvement.

Sur la même ligne, l’association d’exilés ukrainiens en Allemagne Vitsche a jugé que l’événement « échoue à délivrer un message clair » sur le soutien à l’Ukraine que les opposants russes évitent d’affirmer pour ne pas s’aliéner leurs concitoyens [86].

Le même jour, Tatiana Davidis a appelé à se réunir à Strasbourg « pour une paix juste en Ukraine et pour la liberté en Russie ». La militante vit à Colmar depuis qu’elle a quitté la Russie en septembre 2022. En raison des persécutions politiques, elle a obtenu un visa humanitaire en France, comme son compagnon Feraposhkin Slava, également employé de l’association Memorial. La manifestation a été suivie d’une séance d’écriture de lettres aux prisonniers politiques russes [87].

Future Russia, qui se définit contre une organisation d’opposants russes à la guerre en Ukraine et à la dictature de Poutine a réuni une cinquantaine de manifestants devant le Palais des nations, à Genève [88].

Industries militaires

Le sous-sol d’un hôtel de luxe de Kiev accueille le second Forum international des industries de défense, piloté par Oleksandr Kamychine, conseiller spécial de Zelensky en charge des industries stratégiques. 750 visiteurs de trente pays sont présents. Ils représentent 168 entreprises internationales et 115 compagnies ukrainiennes. Un industriel français précise « Il ne s’agit pas juste d’aider l’Ukraine, mais d’investir et de devenir partenaires. » Le Danemark est le premier partenaire de l’Ukraine en aide militaire et en investissement dans l’industrie de l’armement. En 2025, l’Ukraine deviendra le premier producteur européen de drones de tous types. « C’est en Ukraine que l’histoire de la guerre future s’écrit », confirme un participant français. Oleksandr Kamychine commente « L’industrie ukrainienne de l’armement a connu une véritable renaissance au cours des 18 derniers mois. […] Désormais nous pouvons tout produire. […] Il est de l’intérêt de la France de la Pologne de l’Allemagne et d’autres de nous aider à financer notre industrie parce qu’un jour, nous allons vous apporter nos capacités d’industrie et de défense à notre tour. Vos industries ne sont pas capables de produire des millions de drones FPV mais vos armées en auront besoin un jour [89]. »

Olga Taratuta

Dans l’émission Si vis pacem de l’Union pacifiste sur Radio libertaire, deux militants de l’association Olga Taratuta ont expliqué comment celle-ci informe sur les insoumis et les déserteurs russes et ukrainiens et les aide. Elle a obtenu l’asile en France pour deux insoumis russes et la compagne ukrainienne de l’un d’eux.

La suite de l’émission traite des objecteurs de conscience israéliens et des 230 réservistes qui refusent de combattre tant que le cabinet du Premier ministre n’aura pas conclu un accord de cessez-le-feu permettant la libération des otages israéliens retenus à Gaza. Enfin sont évoqués les réfractaires aux armées en Birmanie, en Haïti et au Soudan. Concernant ce dernier pays, on peut lire dans Le Monde libertaire [90] l’interview d’un anarchiste qui déclare :

« Nous ne soutenons aucune des parties engagées dans la guerre et voulons son arrêt immédiat.
Nous condamnons fortement les massacres commis par les Forces de Soutien Rapide (FSR) et par l’armée contre d’innocents citoyens, et nous ne soutenons ni les uns ni les autres.
Nous voulons la fin de la guerre et l’établissement de la paix. […]
Longue vie à la paix pas à la guerre. »

Un saboteur condamné

Un tribunal russe a condamné un homme à douze ans de prison pour avoir aidé à mettre le feu à des armoires électrique utilisées pour le fonctionnement du réseau ferroviaire. Il aurait reçu pour cela une « récompense » de 5 000 roubles (47 €) [91].

Vika Roshchyna

La journaliste ukrainienne free-lance Victoria (Vika) Roshchyna a disparu dans les territoires occupés par la Russie en août 2023. Ce n’est qu’en avril 2024 que la Russie a reconnu son arrestation. Selon l’Ukraine, elle figurait sur une liste d’échange de prisonniers. Début octobre 2024, le ministère russe de la Défense a annoncé son décès à son père. Son corps n’a pas encore été rapatrié [92].

Estonie

La majorité parlementaire estonienne a déposé un projet d’amendement constitutionnel pour retirer aux Russes et Biélorusses le droit de vote aux élections locales. 31 % de la population sont russophones. Ils sont Russes, parfois installés en Estonie de longue date, Biélorusses, Ukrainiens ou apatrides.

Seuls 2 539 électeurs ont voté à l’ambassade russe pour l’élection présidentielle. Ils l’ont fait à 75 % en faveur de Poutine.

Des opposants au projet refusent de jeter la suspicion sur un segment de la population ou préféreraient tester la loyauté des candidats [93].

Lituanie

Les Biélorusses Vitali Dvarashyn, objecteur de conscience, et Mikita Sviryd, déserteur, sont menacés d’être expulsés de Lituanie. Vitali, qui a reçu un permis de séjour de sept ans, est à présent déclaré « menace pour la sécurité nationale en Lituanie ». Isolé dans un camp de réfugiés, il s’est vu refuser l’asile. Pour échapper à l’arrestation et à l’expulsion, il s’est caché. Les déserteurs risquent la peine de mort en Biélorussie, complice de l’agression russe en Ukraine. Plusieurs organisations antimilitaristes ont pris la défense des deux défecteurs auprès de la Lituanie et de l‘Union européenne [94].

Échanges humanitaires

Les médiateurs russe et ukrainien aux droits humains ont annoncé s’être rencontrés en Biélorussie pour évoquer des questions humanitaires. Ce qui a permis le rapatriement des corps de 563 soldats ukrainiens et de 37 russes et l’échange de listes de prisonniers de guerre et de lettres de leurs familles leur étant destinées. Une femme de 91 ans habitant en Ukraine a été rapatriée en Russie, dans sa famille.

Le président biélorusse Alexandre Loukachenko a gracié 31 personnes emprisonnées pour « extrémisme », parmi elles des malades et des handicapés. Près d’une centaine de prisonniers au total avaient été libérés en août et en septembre [95].

Condamnations par la Russie de ses propres soldats

Deux soldats russes ont été condamnés à la perpétuité en Russie pour avoir assassiné, en 2023, une famille entière de neuf personnes, dont deux enfants, dans une ville occupée d’Ukraine. C’est une rare reconnaissance par la Russie de ses exactions dans les territoires qu’elle occupe [96].

Pour la Sainte Russie

La Maison d’édition du Patriarcat de l’Église orthodoxe russe de Moscou a publié un nouveau livre du patriarche de Moscou et de toute la Russie Kirill, Pour la Sainte Russie : patriotisme et foi [97].

Sans l’Église orthodoxe russe, les victoires de la Russie « sur les forces étrangères » auraient été impossibles, car elle seule pouvait « inspirer les guerriers pour les batailles historiques ». Malgré l’accomplissement réussi de cette mission par l’Église orthodoxe russe pendant 1 035 ans, aujourd’hui encore « les ennemis de la Russie tentent de toutes leurs forces de la détruire et de la conquérir », et le peuple doit à nouveau être élevé pour « défendre la Patrie ».

Le patriarche commence chaque chapitre du livre par une citation de Vladimir Vladimirovitch Poutine. Poutine proclame, et Kirill commente et explique. Par exemple : « L’orthodoxie et la Russie sont inséparables », alors que la Constitution affirme « Les associations religieuses sont séparées de l’État ». Dans les régions musulmanes et bouddhistes, les orthodoxes sont statistiquement insignifiants.

« La tradition russe, les sanctuaires de la civilisation russe et la grande culture russe sont la valeur et le sens les plus élevés de la vie. », rappelait le patriarche récemment. Il lance ce slogan « Mobilisation de tous : l’armée, les forces politiques. Et bien sûr, l’Église doit être mobilisée. » Selon lui, l’islam est plus proche de l’Église orthodoxe russe que du christianisme occidental. L’Islam et l’orthodoxie, dit-il, appartiennent au même groupe oriental. « L’Est s’est révélé moins réceptif aux innovations. » Il qualifie l’orthodoxie et l’islam de « notre tradition spirituelle [98] ».

Marche à Berlin

Ilya Iachine, Vladimir Kara-Mourza et Ioulia Navalnaïa appellent tous ceux qui le peuvent à venir à la grande marche contre la guerre à Berlin le 17 novembre.

L’appel des organisateurs : « Ce sera une marche pour exiger le retrait des troupes russes d’Ukraine, juger Vladimir Poutine comme criminel de guerre, et libérer tous les prisonniers politiques. »

Russie Libertés organise le voyage en car de Paris à Berlin [99].

[3https://novayagazeta.ru/articles/2024/12/20/za-nashu-svobodu, publié et consulté le 20 décembre 2024.

[7Brigades éditoriales de solidarité, 20 novembre 2024.

[8Daria Gerasymtchuk, commissaire présidentielle d’Ukraine aux droits de l’enfant, novembre 2022.

[11Rémy Ourdan, « En Ukraine, la difficile quête des disparus du champ de bataille », Le Monde, 21 décembre 2024.

[12Jack Dion, « L’Otan fait monter les enchères », Marianne, 19 décembre 2024.

[18https://zona.media/news/2024/12/10/vstrechi, publié et consulté le 10 décembre 2024.

[19Benjamin Quénelle, « Je suis né dans la Russie libre. Ce pays n’existe plus », 12 décembre 2024.

[20Faustine Vincent, « En Géorgie, le pouvoir parie sur la peur », Le Monde, 13 novembre 2024.

[21Julie Clarini, « Oublie Poutine, bouquine », https://www.nouvelobs.com/bibliobs/20241214.OBS97801/oublie-poutine-bouquine.html?M_BT=68431130352995, Publié et consulté le 14 décembre 2024.

[22https://novayagazeta.ru/articles/2024/12/14/litsom-v-pol, 14 décembre 2024, consulté le 15 décembre 2024.

[23Patrice Campo, « Des pneus Michelin sur des avions russes malgré l’embargo, relève le renseignement ukrainien », La Montagne, 12 décembre 2024.

[24Andrea Sceresini, “ Stanchi di guerra, dizersioni a valanga su estrambi i fronti “ (Fatigués de la guerre, désertions massives sur les deux fronts), 4 décembre 2024.

[25Alain Barluet, « Ukraine : Moscou aurait recruté des mercenaires houthistes au Yémen », Le Figaro, 2 décembre 2024.

[26Raphaël Godet, France Info, 19 novembre 2024.

[27Propos recueillis par Benjamin Quénelle, « La guerre a tué la liberté et la culture en Russie », 3 décembre 2024.

[28https://rabkor.ru/columns/editorials/2024/11/14/address-by-boris-kagarlitsky, 14 novembre 2024, consulté le 2 décembre 2024.

[29Cité par Courrier International, 5 décembre 2024.

[30Propos recueillis par Alain Barluet, « La dissuasion ne fonctionne plus, il faut réinstaurer la peur », Le Figaro, 3 décembre 2024.

[31« Moscou montre ses muscles », Courrier international, 5 décembre 2024.

[32Alain Barluet, « La menace atomique, carte maîtresse de Poutine », Le Figaro, 3 décembre 2024.

[33France Info, 3 décembre 2024.

[34Cité par Courrier International, 5 décembre 2024.

[35Ibidem.

[37« Ukraine : la France a livré des armes à la Russie jusqu’en 2020 », https://disclose.ngo/fr/article/ukraine-france-a-livre-armes-russie, 14 mars 2022. Cf. également « Guerre en Ukraine : comment la France contourne l’embargo sur la Russie », Les Notes de l’Observatoire n° 7, https://www.obsarm.info/spip.php?article560 ainsi que nos articles sur le site.

[39Benjamin Quénelle, « Le Kremlin refoule la mémoire des répressions », Le Monde, 5 décembre 2024.

[40Benjamin Quénelle, « Des vidéos de doléances des Russes à Poutine », Le Monde, 6 décembre 2024.

[41https://novayagazeta.ru/articles/2024/12/07/vo-imia-ottsa-no-i-za-syna, 7 décembre 2024, consulté le 8 décembre 2024.

[42https://meduza.io/feature/2024/12/05/ya-ne-mogu-ne-pomoch-gruzinam, 5 décembre 2024, consulté le 8 décembre 2024.

[45Patrick Le Tréhondat, « L’Ukraine est seule (ou presque) », Soutien à l’Ukraine résistante, n° 35, 12 novembre 2024.

[46Oleksandr Kyselov, « Pour vaincre la Russie, les citoyens doivent s’intéresser à l’avenir du pays », ibidem.

[47« Voznessensk : « Une centaine de soldats se rassemblent », ibidem.

[48« Kyiv : « La fin de la guerre n’est pas en vue et ils sont de moins en moins nombreux », ibidem.

[49Ibidem.

[51https://t.me/Koord_shtab/9434, publié et consulté le 29 novembre 2024.

[57« Salon du livre de Francfort : les éditeurs ukrainiens protestent », ibidem.

[58https://zona.media/online/2024/11/27/gorinov, 27 novembre 2024, consulté le 28 novembre 2024.

[60https://zona.media/article/2024/11/25/savchenko, 25 novembre 2024, consulté le 28 novembre 2024.

[61https://zona.media/online/2024/11/20/kozyreva-8, 20 novembre, consulté le 29 novembre 2024.

[63https://ovd.info, publié et consulté le 19 novembre 2024.

[64Vera Chelishcheva, https://novayagazeta-ru.translate.goog/?_x_tr_sl=auto&_x_tr_tl=fr&_x_tr_hl=fr, 21 novembre 2024, consulté le 24 novembre 2024.

[67https://zona.media/news/2024/11/22/sandulsky, publié et consulté le 22 novembre 2024.

[68https://zona.media/news/2024/11/22/forum, publié et consulté le 22 novembre 2024.

[69Benjamin Quénelle, « Les deux faces de la société russe », Le Monde, 21 novembre 2024.

[70Pavel Vassiliev, https://zona.media/article/2024/11/15/kursk, 15 novembre 2024, consulté le 22 novembre 2024.

[72Chloé Hoorman et Faustine Vincent, « Washington livre des mines antipersonnel à Kiev », Le Monde, 22 novembre 2024.

[78https://t.me/sotavisionmedia/38520, publié et consulté le 14 novembre 2024.

[80Propos recueillis par Benjamin Quénelle, Le Monde, 17 novembre 2024.

[81Propos recueillis par Francis Brochet, « L’État est aussi en guerre avec sa propre société civile », Le Progrès, 16 novembre 2024.

[82Francis Bochet, « Zoom / Un million et plus de "relokanty", les relocalisés », ibidem.

[8328 minutes, Arte, 16 novembre 2024. Diana Kuryshko, https://www.bbc.com/news/articles/clywj08d89no

[84Veronika Dorman, « Nous devons monter que nous, les Russes, sommes nombreux à être contre Poutine », Libération, 18 novembre 2024.

[85« Exilée, affaiblie et déchirée, l’opposition russe veut renaître avec une manifestation à Berlin », https://information.tv5monde.com/international/exilee-affaiblie-et-dechiree-lopposition-russe-veut-renaitre-avec-une-manifestation, 14 novembre 2024.

[87Guillaume Krempp, « Dimanche 17 novembre, un rassemblement pour la paix en Ukraine et la liberté en Russie », https://www.rue89strasbourg.com/rassemblement-pour-la-paix-en-ukraine-et-la-liberte-en-russie-319443

[89Stéphane Siohan, « L’Ukraine ambitionne de devenir l’arsenal de l’Europe », Le Soir, 18 novembre 2024.

[90« Interview d’un compagnon anarchiste », octobre 2024.

[92Jean-Paul Marthoz, « Vika Roshchyna, au cœur des ténèbres », Le Soir, 8 novembre 2024.

[93Anne Françoise Hivert, « L’Estonie veut priver les Russes du droit de vote aux scrutins locaux », Le Monde, 9 novembre 2024.

[94Communiqué de presse, 29 juillet 2024, « Refuge pour les objecteurs du Bélarus », Union pacifiste, septembre-octobre 2024.

[96https://t.me/tass_agency/284255, publié et consulté le 8 novembre 2024.

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