Résistances

Les réfractaires depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie (12ème partie • mars 2024)

Mis à jour le 2 avril 2024

Actions contre la guerre Antimilitarisme Guerres Service national / conscription

Mise en ligne : Mardi 12 mars 2024
Dernière modification : Vendredi 12 avril 2024

Depuis octobre 2022, Guy Dechesne recense longuement les actes de désertion, d’insoumission, de désobéissance et d’exil posés pour refuser de combattre, les actions de désobéissance civiles pour entraver la guerre et les appuis que les réfractaires reçoivent tant dans les pays concernés qu’à l’étranger dans le prolongement d’un dossier paru dans le numéro 164-165 de « Damoclès ». Cette rubrique est rédigée à partir d’un suivi méticuleux des médias. 12ème épisode, mars 2024.

Retrouvez les épisodes précédents dans la rubrique Résistances

Tortures

Les suspects de l’attentat du Crocus City Hall à Moscou ont subi des tortures attestées par des vidéos et des photos apparemment diffusées par les forces de sécurité. Dmitri Peskov, porte-parole du Kremlin, a refusé de les commenter. Des hommes politiques ont réclamé le rétablissement de la peine de mort. Dmitri Medvedev, ancien président et responsable de la sécurité a interrogé : « Devons-nous les tuer ? Il le faut. Et nous les tuerons. »

Un rapport des Nations Unies indique que la Russie a créé « un climat de peur étouffant » dans les zones occupées en Ukraine où ses forces procèdent à des « détentions arbitraires », des « tortures » et tentent de supprimer l’identité ukrainienne, surtout chez les enfants [1].

Les paradoxes du Kremlin

La Russie a combattu les islamistes en Afghanistan, en Tchétchénie, où Poutine considérait que les rebelles étaient des terroristes sans « obédience idéologique ou religieuse », en Asie centrale, en Syrie et au Sahel [2]. Poutine et Ramzan Kadyrov, le leader de la Tchétchénie qui impose la charia prônée par les terroristes, combattent l’Ukraine ensemble.

Lors d’un point de presse, Dmitri Peskov a été interrogé sur la manière dont des terroristes islamistes pourraient être liés à l’Ukraine présidée par un juif. Il a répondu « Eh bien, il y a là un Juif particulier [3]. »

Le 5 septembre 2023, Poutine a déclaré que les « conservateurs occidentaux » avaient placé un « juif de souche » à la tête de l’Ukraine afin de « dissimuler l’essence antihumaine » de l’Ukraine moderne. « Cela rend la situation extrêmement dégoûtante : un juif de souche dissimule la glorification du nazisme et de ceux qui ont autrefois dirigé l’Holocauste en Ukraine, et il s’agit là de l’extermination d’un million et demi de personnes. » En juillet 2023, Poutine a expliqué que, selon ses « amis juifs depuis l’enfance », Zelensky « n’est pas juif, mais une honte pour le peuple juif ». Le grand rabbin d’Ukraine Moshe Reuven Azman a répondu que lui et l’ensemble de la communauté juive d’Ukraine étaient fiers de Zelensky et le soutenaient [4].

L’attentat du Crocus City Hall commis par des terroristes d’Asie centrale a ravivé en Russie la xénophobie, l’islamophobie et le nationalisme slave, contrairement au souhait du pouvoir qui oriente les soupçons vers l’Ukraine. Valentina Tchoupik, qui coordonne, en exil, un réseau de défense des migrants dénonce que « chaque jour, des milliers de personnes sont interpellées, pas seulement tadjikes, ce qui donne lieu à des vols, des violences, des menaces de poursuites pour des motifs fallacieux et des expulsions par centaines. » Des députés du Parti communiste ont demandé un durcissement de la législation et une diminution des entrées des populations d’Asie centrale.

Pourtant, Vladimir Poutine évoque régulièrement le danger de la division dans un pays multi-ethnique où les musulmans représentent jusqu’à 20 % de la population. D’autant plus que les minorités nationales sont surreprésentés dans les rangs de l’armée et que les migrants sont moins nombreux, effrayés par les campagnes de recrutement agressives pour le front ukrainien [5].

Médias

L’animateur de l’émission « Conversation en ligne » sur la chaîne de télévision Volgograd 1, Sergueï Mazanov, a lu à l’antenne les noms de plus de quinze personnes qui, après la mort d’Alexeï Navalny, ont apporté des fleurs au monument municipal aux victimes de la répression politique et ont été identifiées par des caméras [6].

Des habitants de Belgorod, bombardés par l’Ukraine et parfois par la Russie, se sont plaints auprès du présentateur Vladimir Soloviev. D’après celui-ci, les mécontents sont « une grande quantité de saletés se faisant passer pour des blogueurs » pour « briser notre unité » et faire croire que « le pouvoir fédéral a oublié Belgorod [7] ».

En Russie, six journalistes de médias indépendants ont été arrêtés. L’un d’entre eux a fait l’objet de sévices et de menaces. Il a été emmené à l’hôpital en ambulance [8].

État de guerre

Dmitri Peskov a reconnu, le 22 mars 2024, que la Russie est en état de guerre. « Nous nous trouvons en état de guerre. Oui, cela a commencé comme une opération militaire spéciale, mais dès que toute cette bande s’est formée, quand l’Occident collectif a participé à tout cela aux côtés de l’Ukraine, pour nous, c’est devenu une guerre. » De nombreuses personnes ont auparavant été condamnées pour avoir nommé « guerre » l’opération militaire spéciale [9].

Conscription de printemps

L’état-major russe a annoncé une campagne de conscription à partir du 1er avril 2024. Les conscrits effectueront un service d’un an sans participer à l’opération militaire spéciale.

À la mémoire d’Alexeï Navalny

Le 40ème jour après la mort de l’homme politique, de nombreux musiciens russes ont sorti un morceau de dix minutes dédié à Alexeï Navalny. La chanson s’appelle « À la mémoire d’Alexeï Navalny ». Le clip a été publié sur la chaîne YouTube Navalny Live et a été tourné dans le style de la série animée « Rick et Morty », que Navalny adorait.

Le magazine Society rappelle que plus de quarante ressortissants russes, hommes d’affaires, oligarques, critiques de la guerre ou opposants ont été tués par balles ou empoisonnements ou se sont suicidés ou sont morts dans des conditions très suspectes. Il relate aussi les péripéties vécues par Alexandre Navalny, de son empoisonnement en 2020 à son retour et son arrestation en Russie, en passant par son séjour en Allemagne où il se rétablit et prépare sa campagne contre Poutine [10].

Ilia Iachine

De sa prison, Ilia Iachine analyse le régime russe :

« Le régime de Vladimir Poutine repose sur plusieurs bases fondamentales : […] La peur, la corruption le revanchisme. Mais le soutien-clé de ce régime, c’est peut-être un cynisme toxique omniprésent. […]
Dès le début du règne de Poutine, notre société a cyniquement échangé sa liberté et ses droits civiques contre la garantie d’une stabilité politique et d’une croissance de la consommation. Les élites ont cyniquement accepté de laisser à Poutine le monopole du pouvoir en échange d’un accès illimité aux ressources de l’État. […]
Le cynisme est toujours resté pour Poutine un outil politique. […] Il a tenté d’appliquer la même tactique à ses relations avec les hommes politiques occidentaux en usant partout de combines à corruption et de mécanismes d’enrichissement personnel pour ses vis-à-vis européens, tout en essayant de partager avec eux les sphères d’influence dans le monde. […] On pourrait citer toute une série d’hommes politiques occidentaux dont la loyauté a pratiquement été achetée par le Kremlin.
Alexeï Navalny représentait un danger pour Poutine, avant tout parce qu’il a proposé à la société russe une politique fondamentalement différente. Un pays où tous les hommes sont égaux devant la loi, où il n’y a pas de place pour la corruption et les inégalités sociales, un pays libre et ouvert au monde, un pays établissant des relations amicales avec ses voisins, un pays dont la valeur principale est l’être humain, sa vie et sa dignité. […]
L’hypocrisie de l’État, l’arbitraire judiciaire et policier, le mensonge des fonctionnaires et du président lui-même, la croissance menaçante du militarisme étaient devenus évidents pour beaucoup. Comme l’a exprimé un autre opposant assassiné, Boris Nemtsov, "sous Poutine, la vie est devenue meilleure mais plus dégoûtante".
Le rêve de Navalny semblait donc une option de plus en plus attrayante. Car ce sont précisément les rêveurs qui font avancer le progrès humain. […]
Je suis convaincu que ces transformations sont inévitables. Parce que le passé que Poutine incarne est toujours perdant face à l’avenir, associé désormais fermement au nom d’Alexeï Navalny [11]. »

Azat Miftakhov

Le mathématicien Azat Miftakhov a pris la parole à la fin de son procès pour « justification du terrorisme » :

« L’État révèle son essence terroriste, que les anarchistes avaient soulignée avant les dernières élections présidentielles, en descendant dans la rue avec le slogan “Le FSB est le principal terroriste”. Aujourd’hui, ce que nous disions à l’époque est devenu une évidence non seulement dans notre pays, mais dans le monde entier. Nous voyons maintenant comment toute la politique étrangère et intérieure de l’État se réduit à un tapis roulant de meurtres et d’intimidations. […] On voit que l’État, tout en proclamant verbalement la lutte contre le terrorisme, cherche en réalité à maintenir son monopole sur le terrorisme. […]
Je suis reconnaissant à tous ceux qui m’ont écrit des lettres pleines de chaleur et de bons vœux. […] J’en recevais des piles presque chaque semaine. Je suis sûr qu’une telle attention à mon égard a dû être prise en compte par ceux qui cherchaient à me soumettre. Je suis très heureux et touché que les gens partagent avec moi un morceau de leur vie […]. Chaque lettre me tient très à cœur et je n’en laisse jamais une seule sans être lue [12]. »

Giuliano Da Empoli

L’auteur de Le Mage du Kremlin (Gallimard 2022) répond aux questions de Libération :

Le romancier russe Dmitri Gloukhovski, accusé d’« avoir discrédité les forces armées russes dans un message publié sur Instagram et d’avoir accusé Vladimir Poutine d’être responsable du conflit » en Ukraine est condamné par contumace à huit ans de prison [13]. « Il a dit qu’un écrivain russe n’a pas besoin de beaucoup d’imagination tant la vie russe est pleine de rebondissements. »

« Prenez ces deux personnages, que tout oppose : Evgueni Prigogine et Alexeï Navalny, le gangster et le martyr, ils semblent sortis d’un roman de Pouchkine ! Cela dit, je suis très sensible à la souffrance des opposants russes. […] Il va falloir aider davantage les opposants russes réfugiés chez nous. Indispensable, si nous voulons imaginer un autre avenir pour la Russie. »

« Rétrospectivement, on se dit que c’est une tragédie que [Navalny] ait choisi de retourner en Russie. C’était quelqu’un de problématique par rapport à nos valeurs, nationaliste avec des relents de xénophobie, mais cela faisait aussi sa force, car il savait toucher les cordes populistes, son discours résonnait chez les Russes.

Un Manuel Macron a progressivement saisi que Poutine ne comprend que le langage de la force. Mais la surenchère, c’est la dimension de Poutine, et je ne trouve pas utile de le suivre sur cette voie. En temps de guerre, la surenchère fait partie de ce que Clausewitz appelait la montée aux extrêmes, et il ne faut pas l’encourager [14]. »

Un Français tsariste sur le front russe

Gabriel Dorochine se répand sur Telegram et les médias russes. Un documentaire de cinquante minutes lui a été consacré à la télévision. Ce Lyonnais a combattu dès 2014 pour, selon ses termes, « la protection des habitants martyrisés du Donbass ». Cela a valu la nationalité russe à cet apparenté au tsar Nicolas II. Il se marie dans une église orthodoxe lyonnaise. Il combat dans des milices néonazies. Il écope en France d’une fiche « S ».

Il revendique son passé dans le Groupe union défense (GUD), dans les manifestations contre le mariage homosexuel et dans des bagarres. Il pose devant un grand portrait de Pétain. Valeurs actuelles publie une vidéo qui raconte son séjour en Ukraine occupée. Il affiche sa sympathie pour la milice Wagner avec laquelle il a peut-être collaboré.

Il signe ses publications favorables à la guerre « jusqu’au dernier Ukrainien » par « Pour la foi, pour le tsar et pour la patrie [15]. »

Biélorussie

« Il y a aujourd’hui 1 400 prisonniers politiques » en Biélorussie, déplore Kastantsin Staradubets de l’ONG Viasna. Il suffit d’avoir sur son téléphone des photos des manifestations de 2020 contre l’élection présidentielle truquée pour être emprisonné. À la sortie de prison, « vous vous retrouvez sur une liste noire » qui vous empêche de retrouver du travail, constate Andrej Stryzhak, à la tête de l’organisation de solidarité Bysol. On est sans nouvelle depuis plus d’un an de prisonniers politiques comme Ales Bialacki, prix Nobel de la paix 2022 [16].

Recrutements illégaux

L’enthousiasme pour les engagements volontaires pour la guerre diminue en Ukraine, notamment à cause de la baisse des armements qui rend les combats plus dangereux. Une loi sur la mobilisation et la démobilisation des combattants et la répression des récalcitrants est bloquée au parlement depuis le 7 février 2024. Quatre mille amendements ont été déposés. Les recrutements illégaux et brutaux augmentent. « Il suffit qu’un homme ait deux bras, deux jambes et une tête pour qu’il soit jugé apte à se battre, s’insurge une avocate. Les centres de recrutement sont une zone de non-droit. Cela nuit à l’image de l’armée. »

Une autre avocate répond à une application payante de conseils immédiat en cas d’arrestation. La moitié des appels émanent de personnes non mobilisables. Elle parle d’hommes qui sont emmenés dans des bureaux de recrutement. Ils sont trop jeunes ou trop âgés pour combattre ou dans une situation familiale, professionnelle ou médicale, qui aurait dû leur permettre de l’éviter. « Ces personnes qui sont présentés comme des combattants volontaires bien qu’elle n’en ait pas exprimé le désir » n’ont souvent pas le temps de consulter un avocat. « Nous avons des cas où les employés des centres de recrutement utilisent des moyens de pression psychologique et, dans certains cas, physique [17]. »

La presse en Ukraine

« La Russie demeure notre plus gros problème. C’est à cause de cette guerre que nous sommes revenus des années en arrière en termes de liberté de la presse », analyse Oksanna Romaniuk, directrice d’une organisation de défense de la liberté de la presse en Ukraine. Des journalistes d’investigation, notamment sur la corruption, sont victimes de pressions, de menaces et de campagnes de discrédit. Ils se heurtent de plus en plus souvent au « secret-défense ». L’un d’eux reconnaît qu’il peut travailler librement mais que la concentration des pouvoirs de Zelensky sont une « réelle menace pour la démocratie ». Six chaines de télévision diffusent les mêmes informations dictées par l’armée et les autorités. 250 médias ont fermé depuis le début de l’invasion, à cause de l’occupation, de la mobilisation des journalistes et des combats. 70 professionnels du secteur ont été tués en 2022 et 2023 [18].

Le site du ministère français des Armées contrefait

Un site contrefaisant celui du ministère français des Armées invite 200 000 Français à s’engager en Ukraine [19]. « Soyez parmi les premiers à défendre les intérêts de la France en Ukraine », notamment « derrière les lignes russes [20]. »

Élection russe

Selon Golos, une organisation d’observation électorale, la réélection de Poutine a été « la plus importante fraude de l’histoire des élections en Russie [21]. »

Le vote protestataire contre Poutine a été majoritaire dans la plupart des bureaux de vote à l’étranger. À Paris, le candidat « libéral » a récolté 51 % des voix contre 11 % à Poutine et 28 % de bulletins non valides.

La Russie a favorisé les votes dans les pays qui lui sont favorables. En Allemagne deux bureaux étaient ouverts pour 2 à 3 millions de citoyens russes. En Transnistrie, région séparatiste pro russe de Moldavie, 27 bureaux accueillaient 250 000 électeurs [22].

Le dernier jour de l’élection, 21 artistes russes exilés et opposés à la guerre en Ukraine ont organisé « Cellule », une brève exposition non autorisée, au Centre Pompidou, à Paris. Leurs œuvres étaient enfermées dans les casiers transparents des consignes de vestiaire qui sont éclairés de couleurs différentes selon qu’ils sont occupés ou non [23].

Le Maître et Marguerite

Mikhaïl Lokchine a réalisé le film Le Maître et Marguerite d’après le roman de Mikhaïl Boulgakov, interdit sous Staline pour sa critique de l’autoritarisme, puis censuré jusqu’en 1973. En deux mois, deux millions de Russes ont vu le film. Le cinéaste a condamné l’invasion de l’Ukraine. Il subit la critique de Russia Today : « Il est regrettable que la renaissance de notre cinéma, qui compte de nombreux chefs-d’œuvre patriotiques brillants […] soit interrompue par une démonstration de propagande terroriste et satanique concoctée par un sponsor des forces armées ukrainiennes. » La radio Spoutnik surenchérit : « Une ordure doublée d’un russophobe… »

Les ouvrages d’opposants exilés sont retirés des librairies. Les pièces de Boris Akounine sont jouées mais son nom est retiré de l’affiche [24].

Droit d’asile

Le 22 mars 2024, dix-neuf ressortissants russes ont obtenu l’asile en France depuis le début de l’année, a fait savoir la Cour nationale du droit d’asile (CNDA). L’organe public avait adopté en juillet 2023 une doctrine consistant à accorder le statut de réfugié aux ressortissants russes qui avaient « démontré l’existence de risques personnels de persécution en cas de retour en Russie, en raison de leur insoumission à la mobilisation partielle dans le cadre de la guerre conduite par les forces armées russes contre l’Ukraine [25]. »

Opposition parlementaire à Zelensky

Plusieurs députés ukrainiens de l’opposition à Zelensky dénoncent un contrôle abusif de leurs déplacements à l’étranger [26].

Le Dessous des images

Dans l’émission Le Dessous des images [27], Arte analyse, une vidéo réalisée, le 1er novembre 2022, par smartphone sur le front ukrainien et consultée deux millions de fois. On y voit quelques soldats dans une tranchée où leur commandement exige leur maintien. Ils sont dépourvus d’armes susceptibles de s’opposer aux roquettes et aux blindés russes qui les menacent. La vidéo est rediffusée en août 2023, sous-titrée en anglais. Les soldats ont désobéi et quitté leur position. Ils ont évité des sanctions grâce à la vidéo montrant leur situation désespérée sur deux fronts, contre leur commandement et leurs ennemis. Cette diffusion, à la fois testimoniale et testamentaire, fait écho aux cartes postales envoyées par les poilus de 14-18 et à leurs contournements de la censure.

Répression en Russie

La Russie a lancé en 2023 plus de poursuites pénales pour trahison qu’au cours des vingt dernières années, affirme l’ONG Perviy Otdel, qui aide les personnes poursuivies pour trahison. En moyenne, vingt dossiers judiciaires ont été ouverts chaque mois l’année dernière sous ce chef d’accusation, contre vingt pour l’ensemble de 2022.

Ksenia Karelina

Ksenia Karelina, une Russo-Américaine a été arrêtée à sa descente d’avion à Ekaterinbourg, où elle venait voir ses parents. Quelques mois plus tôt, elle avait donné cinquante euros à l’ONG américaine Razom, qui finance l’aide humanitaire en Ukraine. Accusée de haute trahison pour avoir « récolté des fonds pour l’armée ukrainienne », elle risque vingt ans de prison.

Alyosha Deminn

Le nombre de morts en détention a flambé. L’administration pénitentiaire ne publie aucun chiffre, mais le quotidien indépendant Novaïa Gazeta a révélé après une longue enquête dans tout le pays que leur nombre a doublé entre 2022 et 2023, avec au moins 70 cas. Sur la même période, le nombre de poursuites criminelles contre des membres des forces de l’ordre accusés de violence à l’encontre de détenus a diminué. « Les gardiens sont même récompensés pour leur brutalité », affirme Alyosha Deminn, détenue et torturée pendant trente-trois jours pour avoir participé en 2021 à une manifestation de soutien à Alexeï Navalny. Un employé de son centre de détention contre lequel elle avait porté plainte a été promu au ministère de la Justice. « Voilà la Russie de Poutine. Plus vous êtes cruel, plus vous êtes apprécié par le pouvoir. »

Viktoria Petrova

Viktoria Petrova, ayant réaffirmé ses positions anti-guerre lors de son procès, a dû subir des examens psychiatriques ordonnés par le juge : taxée d’« incompétence mentale » par les médecins, elle a été placée en hôpital psychiatrique. Son avocate, Anastasia Pilipenko, a décrit dans la presse des humiliations et mauvais traitements répétés, et même « des injections forcées de substances qui la laissent incapable de parler pendant des jours [28] ».

Ilia Iachine

Aux premiers jours de la cinquième élection de Poutine, Ilia Iachine répond aux questions de Libération et à celles de L’Obs, depuis la prison où il purge une peine de huit ans et demi. Il se veut optimiste :

Libération

« Il n’y a pas d’élections, mais une production théâtrale de mauvaise facture, avec des décors vétustes et des acteurs médiocres à la solde de Poutine. […] Seule une petite minorité de Russes soutiennent la guerre. La grande majorité de la population, même si elle ne proteste pas, par conformisme et instinct de survie, ne fait que s’adapter aux conditions nouvelles, en essayant de survivre à la guerre comme à une catastrophe naturelle. […]
Au durcissement des répressions, il faut répondre par un renforcement de la solidarité. Aux assassinats et arrestations des leaders d’opposition, par la formation de structures horizontales, impossibles à décapiter. […]
Les hommes ne s’engagent dans l’armée que pour l’argent. Malgré tous les efforts de Poutine pour déchaîner l’hystérie patriotique, sa guerre avec l’Ukraine n’est pas devenue la guerre du peuple. […] Pour pousser les hommes des provinces russes à aller sur le front, il faut les motiver non pas avec des idées mais avec de l’argent et des bénéfices sociaux. Ou envoyer des taulards en leur promettant la liberté et, là encore, de l’argent.
Je ne vais pas mentir : moralement, je suis, évidemment, abattu. Depuis la mort de Navalny, j’ai une boule dans la gorge et suis submergé par la tristesse. […] Mais ma motivation pour continuer le combat est plus forte que ma peine. Je me suis juré à moi-même de ne pas baisser les bras, ne pas avoir peur et de continuer à défendre ma position. […]
Aux yeux du Kremlin, je suis un ennemi, par conséquent me tuer ou me laisser en vie relève du pragmatisme politique et non pas de la morale ou de la loi. […] Dans la Russie d’aujourd’hui, le processus politique ressemble aux règles qui régissent une structure mafieuse. […] Je m’inquiète surtout pour Vladimir Kara-Murza, que les services spéciaux ont déjà tenté d’empoisonner par le passé et qui est actuellement détenu dans des conditions qui relèvent de la torture, similaires à celles de Navalny [29]. »

L’Obs

« Je passe le plus clair de mon temps à lire des livres et à écrire. J’écris des textes, je prépare des discours à lire devant les tribunaux et je réponds aux nombreuses lettres de sympathisants qui sont apportées à ma cellule chaque semaine par paquets de 150 à 200. […]
Après mon arrivée au camp, l’administration locale m’a obligé à travailler. J’avais le choix entre construire une nouvelle caserne ou travailler dans l’atelier de couture où sont fabriqués les uniformes destinés aux hommes envoyés sur le front en Ukraine. J’ai évidemment refusé les deux propositions, en disant explicitement au directeur du camp qu’elles étaient contraires à mes convictions. Un prisonnier politique ne peut pas contribuer à la construction du goulag de Poutine. Et je ne participerai certainement pas, même indirectement, à l’agression contre l’Ukraine. Comment puis-je accepter de coudre des uniformes pour des soldats, alors que je suis en prison pour m’être opposé à cette guerre ?
Mon refus n’a pas surpris l’administration, qui s’en est servie pour m’octroyer le statut de récidiviste et me transférer dans le bâtiment réservé aux détentions strictes. […]
La principale chose que les autorités exigent des prisonniers politiques est le silence. L’administration pose franchement une condition : si vous voulez éviter les mauvais traitements et passer vos années de prison tranquillement, taisez-vous et n’attirez pas l’attention du public sur vous. Si vous refusez de vous taire, votre situation derrière les barreaux se détériore progressivement. […]
Mon choix est de rester une voix de la Russie libre et pacifique, une voix contre la guerre et la dictature, même en prison. C’est ainsi que je comprends ma responsabilité en tant que citoyen, homme politique et patriote. Je m’efforce consciemment de transformer mes procès en tribune politique et de parler des crimes de guerre du Kremlin lors des audiences. Mes comptes sur les réseaux sociaux continuent d’être mis à jour. Un livre antiguerre que j’ai écrit en détention a été publié. La presse continue de publier mes déclarations politiques, mes interviews et mes commentaires.
Je sais que ma vie est entre les mains de Poutine et qu’elle est en danger. Mais quel que soit le sort qui me sera réservé, je veux préserver mon amour-propre face au danger et motiver par mon exemple mes compatriotes à résister à la tyrannie. […]
Immédiatement après mon arrestation, le gouvernement m’a inscrit dans le registre des agents étrangers. […] Entre autres, les « agents étrangers » sont obligés de commencer tout discours public en mentionnant leur statut, et les textes et commentaires dans les médias et les réseaux sociaux doivent être marqués d’une mention correspondante. Cette pratique humiliante rappelle de manière évidente le décret de Hitler obligeant les juifs à porter une étoile jaune. Je n’ai pas l’intention de me soumettre à des pratiques fascistes, j’ai donc refusé de me reconnaître comme « agent étranger » et je ne marque rien. Les enquêteurs auront la possibilité légale d’engager des poursuites pénales contre moi pour « infraction à mes devoirs en tant qu’agent étranger ». […]
Mes avocats me rendent visite en règle générale deux fois par semaine. Il y a une caméra vidéo dans la pièce où nous nous retrouvons et toutes nos conversations sont évidemment enregistrées. […] Psychologiquement, bien sûr, ils me soutiennent également, même s’ils ne sont pas eux-mêmes en sécurité. Rappelons qu’à l’automne, trois des avocats de Navalny ont été arrêtés et sont toujours détenus dans une prison de Moscou. […]
L’espoir est tout ce que j’ai. Je crois en mon pays, je crois en mon peuple et en un avenir décent. Je sais que notre société n’est pas du tout agressive et obscurantiste comme le prétendent les autorités, qu’il y a ici des millions de personnes bienveillantes et bonnes qui méritent un meilleur sort.
Poutine veut faire de la Russie un cimetière de l’espoir. En tuant Navalny, il a tenté de tuer l’espoir d’une alternative pacifique, d’un pays libre et heureux. Mais l’espoir est vivant tant qu’il existe au moins une personne qui le garde dans son cœur. Cela signifie que la bataille pour l’avenir n’est pas terminée et que nous avons encore une chance [30]. »

L’opinion des Russes

« Chaque Russe doit contribuer, dans la mesure du possible, à la réussite de l’opération spéciale. » Selon le Centre panrusse d’étude de l’opinion (Vtsiom), 72 % des sondés approuvent cette formule et 19 % la désapprouvent.

« Dix-neuf pour cent de sceptiques, est-ce peu ou beaucoup ? Difficile de répondre, car émettre un jugement sur cette question peut vous faire frôler la limite de la légalité et du châtiment. En outre, beaucoup de personnes hésitent sans doute à se prononcer sur l’opération spéciale, même dans des conditions d’anonymat — si tant est qu’elles croient à un tel anonymat », commente, avec une extrême prudence, le quotidien moscovite Nezavissimaïa Gazeta, quelques semaines avant la réélection de Vladimir Poutine [31].

64 % des interrogés adhèrent au slogan, repris de la Deuxième Guerre mondiale, « Tout pour le front, tout pour la victoire ! ». « 28 % n’y sont pas favorables. […] C’est presque le tiers des personnes interrogées, il serait donc compliqué de les traiter de lâches, de dégonflés, de traîtres, d’agents étrangers, et de les chasser du pays », se risque à juger le journal.

Les sondages sont moins crédibles que l’expertise d’Alexeï Levinson, un sociologue qui travaille à Moscou. La journaliste tchèque qui l’interroge s’étonne : « Ce qui m’a le plus surprise dans votre dernière étude, c’est qu’elle ait été publiée en Russie et que je puisse aujourd’hui vous parler sans que des barreaux nous séparent. » Le sociologue s’en étonne un peu aussi et dit son appréhension à quitter le pays. Il poursuit :

« La description la plus précise de la relation qu’entretiennent les Russes avec leur leader est la volonté de préserver le statu quo. Les Russes sont convaincus, non sans fondement, que tout changement ne peut être que négatif. Ils tiennent cette idée de leurs parents, de leurs grands-parents… […]
Pour un Russe, la relation avec Poutine est d’abord une relation avec la grandeur et la puissance de la patrie. Il n’a peut-être pas créé une grande Russie, mais il rendu au pays sa puissance. […]
Vous connaissez sûrement la formule "Ils ont peur de nous ? Alors ils nous respectent." Cela suffit au bonheur des Russes. […] Il ne nous reste plus qu’une seule fierté : les armes nucléaires.
Nombreux sont les hommes politiques, les dictateurs, qui ont fait leur la devise "Tout pour mes amis, et la loi pour mes ennemis". Cette formule exprime parfaitement la situation dans laquelle vivent les Russes aujourd’hui. […]
Les Russes ont besoin de Poutine pour se rassurer sur la grandeur et la puissance de leur pays [32]. »

Réélection présidentielle

Dans toute la Russie et dans les bureaux de vote à l’étranger, des milliers d’électeurs opposés à Poutine ont suivi la consigne de venir tous voter le dernier jour du scrutin à midi précise. Des bulletins de vote en faveur d’Andreï Navalny ont été déposés sur sa tombe [33].

Selon l’ONG OVD-Info, spécialisée dans le suivi de la répression, 89 interpellations ont eu lieu en Russie pour diverses formes de protestations électorales [34].

Répression et tortures

Un collectif de militants et spécialistes des droits humains, en particulier en Russie, publie une tribune dans Le Monde. Extraits :

« Il est certain que les soldats du rang se rendant coupables de sévices sur la population ukrainienne, outre qu’ils ont souvent été socialisés à la violence dans leurs casernes, ont une compréhension du fonctionnement normal des institutions imprégnée des modes opératoires policier et pénitentiaire, d’autant que l’armée accueille majoritairement des repris de justice. En ce sens, la prison est une véritable matrice de la violence, et particulièrement de la culture du viol dans la société. […]
Encore le tableau est-il appelé à s’obscurcir encore, avec le retour en détention inévitable de prisonniers recrutés en masse pour combattre en Ukraine. Le précédent des deux guerres de Tchétchénie est là pour montrer combien la guerre catalyse l’usage de la torture dans les prisons et les organes de la justice pénale [35]. »

Le tribunal municipal de la région de Moscou a condamné le journaliste de RusNews Roman Ivanov à sept ans de prison dans une colonie à régime général pour fausses nouvelles sur l’armée. Il avait dénoncé des crimes de guerre russes. À la fin du procès, il a déclaré : « Je ne veux pas parler et discuter du journalisme, de ses problèmes en Russie, car il n’y a plus de journalisme en Russie. Je ne veux pas parler du système judiciaire, du tribunal, car il n’y a plus de système judiciaire, ni de justice en Russie non plus. Je ne veux pas parler de politique, qui n’existe pas non plus en Russie. […]
Je me considère chanceux car j’ai des amis qui sont toujours prêts à m’aider. J’ai ma famille, avec qui je n’ai pas communiqué depuis dix mois. J’ai une femme bien-aimée — je suis la personne la plus heureuse au monde qu’elle ait accepté de devenir ma femme. Vous essayez de me rendre malheureux. Je ne sais pas pourquoi vous avez besoin de ça. […]
Dès le début, j’ai parlé de criminalité, de la signification criminelle du déclenchement d’une opération militaire spéciale. Dès le début, j’ai dit aux gens que cela n’apporterait que malheur et chagrin. […]
Ma femme et moi sommes allés en Ukraine à l’été 2018, je viens de partir en vacances en voiture dans la région d’Odessa. En 2018, quand tout le monde m’a dit que je ne devrais pas y aller, "ils verront que tu es Russe, ils te tueront là-bas". Rien de tel ne nous est arrivé. […]
Tout le monde était content de nous voir, nous communiquions à merveille avec tout le monde. Parce que nous n’y sommes pas venus en tank. »

Il continue à raconter qu’un enfant lui a demandé s’il était Russe et s’il allait les tuer. Il poursuit : « Aujourd’hui, en 2024, je pense avec horreur à la façon dont j’ai trompé ces enfants en leur disant : "N’ayez pas peur, il ne se passera rien. Nous ne vous tuerons pas." […]
Je veux demander pardon à tous les citoyens ukrainiens à qui notre pays a causé du chagrin. Que notre pays a privé de leurs proches, de leurs parents, de leurs amis. […] Et pas pour tout le pays, mais personnellement pour moi-même — en tant que citoyen de la Fédération de Russie, Ivanov Roman Viktorovich. Je veux m’agenouiller devant les proches des personnes tuées à Bucha. Même si je ne sais pas qui les a tués. Mais ce sont là les conséquences de ce à quoi notre pays est arrivé [36]. »

Un autre tribunal a ordonné l’arrestation d’Evgeny Savin, un blogueur et ancien footballeur de l’équipe nationale, qui aurait discrédité l’armée. Savin a quitté la Russie en raison du déclenchement de la guerre en Ukraine. En 2020, il a créé le club de football Krasava. Après le début de la guerre, il a transféré toute l’équipe à Chypre. Dans une interview, il a expliqué qu’il ne voulait pas que ses enfants « vivent dans un pays qui déclenche de véritables guerres cannibales avec un pays voisin » [37].

Alexeï Navalny a été enterré le 1er mars 2024. Selon les données du métro moscovite, du 1er au 3 mars, 27 000 personnes de plus que d’habitude sont entrées dans la station de métro Borisovo, la plus proche du cimetière. À cette foule, il faut ajouter ceux qui ont circulé par d’autres moyens ou qui ne sont allés qu’à l’église.

La file de gens se déroulait sur plusieurs kilomètres. Les fleurs déposées sur la tombe atteignaient la hauteur d’homme [38]. Maintenant, constate sa mère, il ne gèlera pas. « Ils l’ont enveloppé de fleurs. » Sur les réseaux sociaux, des sympathisants listent ce qu’ils emportent en prévision d’une arrestation de plusieurs jours [39].

Un chemin direct vers le Paradis

Au fur et à mesure du désengagement de la France en Afrique, la Russie prend sa place [40]. Les milices Wagner épaulaient les pouvoirs autoritaires. Après la rébellion et l’assassinat de leur chef, Evguéni Prigojine, les mercenaires sont rebaptisés Afrika Korps, le même nom que celui des divisions de panzers allemands sous la direction du général Rommel pendant la Deuxième Guerre mondiale. African Initiative est, sur les cendres de celle de Wagner, la nouvelle tête de pont de la propagande russe en Afrique. Elle se définit comme une « agence de presse sur les événements » du continent, en particulier sur « l’héritage néocolonial contre lequel les pays africains luttent » et les « activités » des « militaires, hommes d’affaire, médecins et journalistes » russes. Le Département d’État américain dénonce les désinformations de l’agence, en particulier, sur les expériences de guerre biologique que mènerait l’Occident en Afrique. Viktor Vasilev, dirige l’initiative, sous pseudonyme, pour dissimuler les cinq ans qu’il a passés en prison pour meurtre à caractère raciste [41].

Alors que des Russes combattent en Afrique, des Africains mais aussi des Népalais et des Indiens viennent sur le front ukrainien à l’appel de l’Église orthodoxe. Ils étaient venus restaurer un monastère à l’initiative du Centre culturel russo-chinois (!) « Firebird » qui vise à attirer des étudiants asiatiques. Le blog de Firebird regorge d’articles patriotiques sur les héros militaires et la haine des « nazis ukrainiens ». Selon le patriarche Théodore d’Alexandrie, l’Église orthodoxe russe attire le clergé noir en lui offrant des salaires élevés et une formation en Russie. Il est déterminé à évincer enfin l’Église orthodoxe russe d’Afrique.

Le patriarche Kyrill au Forum Russie - Afrique ; Photo Alexandre Ryumine TASS

L’ancien recteur de l’Académie théologique de Moscou parle de ses voyages sur le front de l’« opération militaire spéciale » comme d’une immersion dans une réalité spirituelle supérieure. « C’est une expérience incroyable pour les prêtres... [Nous] avions l’impression d’avoir visité la Terre Sainte. » Les militaires russes « sont prêts pour la vie éternelle. » « Nous avons tous vu le paradis au milieu de l’enfer absolu — comme aux yeux des saints. Ils sont tous prêts à aller au ciel […]. Une telle grâce n’arrive qu’à ceux qui sont avec Dieu, la Mère de Dieu et tous les saints. »

Ce sermon a inspiré un étudiant africain. « Beaucoup de gars voulaient tout abandonner et aller là où il y a un chemin direct vers le paradis. »

Selon le chef de l’Association russe des experts orthodoxes de l’Église, « Les Africains orthodoxes soutiennent le SVO [Opération militaire spéciale] et portent des uniformes militaires russes en signe de soutien - c’est merveilleux... Recevoir une éducation spirituelle et servir au SVO sont parfaitement combinés, car le SVO est la guerre sainte pour l’orthodoxie. »

En général, les soldats étrangers sous contrat servent dans le Corps d’assaut volontaire, où ils effectuent des missions de combat difficiles, et après un an de service, ils ont droit à la démobilisation avec un nouveau passeport russe pour eux-mêmes, leur femme, leurs enfants et leurs parents. Un décret visant à simplifier et accélérer la procédure de délivrance a été signé le 4 janvier 2024 par Vladimir Poutine [42].

Le patriarche Bartholomée de Constantinople a sévèrement critiqué à plusieurs reprises son collègue moscovite pour son incapacité à transmettre la vérité évangélique aux autorités, l’appelant à démissionner. Le 10 décembre 2022, lors d’une conférence sur la politique internationale à Abu Dhabi, il a parlé de l’écart de l’Église orthodoxe russe par rapport au christianisme, qualifiant la doctrine national-chauvine du « monde russe » de « base de l’idéologie du régime de Poutine » et d’hérésie théologique [43].

« L’ensemble sera un merveilleux cadeau pour une personne liée au service militaire ! », propose une maison commerciale. Il s’agit d’une icône pliable représentant un tank et le prince guerrier et saint, Dimitri Ier Donskoï.

Des recruteurs russes en Inde

Les autorités indiennes affirment avoir arrêté des membres d’un réseau de trafiquants soupçonnés d’avoir recruté et envoyé des citoyens indiens combattre en Ukraine pour l’armée russe [44].

La licorne arc-en-ciel

Dans le but de lutter contre l’idéologie LGBT, une institutrice de Belgorod a forcé une jeune élève à peindre avec un marqueur noir les sabots et la corne arc-en-ciel d’une licorne en peluche.

Violences contre une femme

Un homme a violemment tabassé son ex-femme. Le coupable a fait valoir sa participation aux combats près de Bakmut. Le tribunal l’a condamné à une amende de 5 000 roubles (environ 50 euros). « Un contrat valide a été conclu avec le PMC Wagner, il est donc engagé dans un travail socialement utile. », a tranché le tribunal.

8 mars

À l’occasion de la Journée des droits des femmes, Meduza publie la liste de 91 femmes prisonnières politiques en Russie ou internées de force en hôpital psychiatrique. Les motifs en sont l’extrémisme reproché notamment aux Témoins de Jéhovah, les fausses nouvelles et le discrédit de l’armée, avoir stocké de l’explosif dans son étui à lunettes, avoir battu un policier avec un stylo à bille (2 ans et 10 mois de taule), trahison par un don à l’armée ukrainienne et même par la publication de photos d’un mariage, terrorisme ou sa tentative ou sa justification, réhabilitation du nazisme, profanation de la tombe d’un combattant, espionnage, participation au régiment Azov, fraude, extorsion, incendie de bureaux d’enregistrement et d’enrôlement militaire, participation à des émeutes de masse, insulte aux sentiments des croyants. Deux femmes médecins sont aussi accusées de meurtre d’un nouveau-né [45].

Dans une allocution, Vladimir Poutine salue « celles qui sont maintenant séparées des membres de leur famille et attendent le retour [des] héros [du pays], qui les inspirent par leur amour, leurs encouragements et leur soutien, qui s’inquiètent pour chaque soldat, qui les aident sur le front, dans les hôpitaux et dans de nombreuses organisations de bénévoles ».

« Chères femmes, vous avez le pouvoir d’améliorer ce monde grâce à votre beauté, votre sagesse et votre générosité, mais surtout grâce au plus grand don dont la nature vous a dotées : celui de porter des enfants. La maternité est une mission glorieuse pour les femmes. Une mission difficile et d’une importance capitale, mais aussi une source de tant de joie et de bonheur. La famille reste la chose la plus importante pour une femme, quel que soit le parcours professionnel qu’elle choisit ou le niveau qu’elle atteint », ajoute-t-il [46].

Paris, Marseille ou Lyon ?

Dans une émission diffusée sur la chaîne de télévision d’État russe Rossiya 1, plusieurs chroniqueurs débattent des villes françaises et européennes à raser d’abord par la Russie. « Je ne peux pas me décider : Paris ou Marseille ? » « Lyon est une belle ville. Il y a une fête du feu là-bas », suggère un autre intervenant. Et en Allemagne ? Hambourg ou Munich ? [47] »

Rééducation

Le nombre d’enfants ukrainiens emmenés de force en Russie pendant la guerre est inconnu. Selon Kiev, ils seraient près de 20 000. Des consignes sont adressées aux enseignants chargés de leur rééducation. Une liste d’expressions « contenant des signes d’extrémisme pour des raisons nationalistes » est diffusée. Elle est accompagnée d’un manuel de « Prévention des conflits, des manifestations de l’extrémisme et du terrorisme dans un environnement éducatif multiculturel ».

Les adolescents arrivant des zones de combat peuvent faire preuve de « protestation », de « caprices », de « méfiance à l’égard des adultes », se comporter de manière agressive […]. » On le serait à moins !

Le directeur d’un centre régional pour adolescents explique : « Beaucoup soutiennent l’Ukraine, beaucoup sont contre le chef de l’État. Nous invitons des spécialistes des autorités compétentes pour leur expliquer. » « Les écoliers participent à des jeux sportifs militaires, assistent à des expositions intitulées "Nous sommes contre le nazisme", tirent sur un stand de tir et peuvent même se préparer au service dans les forces armées russes. »

Selon des rapports dont dispose Meduza, les écoliers ukrainiens se plaignent, auprès des psychologues, d’anxiété, de « séparation de leur famille », de panique, de stupeur et de « tendances suicidaires ». Ils parlent de leur « peur des bruits forts » et du « bruit des avions », de leur « chagrin » et de leur dépression. Les enfants craignent d’être « stigmatisés en raison de leur dialecte prononcé » et de « la difficulté de passer rapidement au russe ».

Le Centre d’étude et de suivi en réseau du milieu des jeunes (ANO CISM) est censé lutter contre les tendances suicidaires. CISM est une société informatique qui a reçu des milliards de roubles du budget fédéral. Le centre développe son propre logiciel et l’utilise pour surveiller sur Internet « la propagation de l’idéologie de la violence armée », « l’anarchisme », le « nazisme » et « d’autres types d’informations destructrices ».

Son principal développement est le système d’information automatisé « Prévention », qui surveille en temps réel « plus de 540 millions de profils » d’adolescents sur les réseaux sociaux et considère que plus de deux millions d’entre eux manifestent un « comportement destructeur ».

« Même si un enfant utilisait un pseudonyme sur les réseaux sociaux, changeait d’âge, mettait la photo de quelqu’un d’autre, mettait ses parents sur liste noire, le centre aiderait quand même à l’identifier », explique un employé du ministère.

« Le CISM est à l’affût, surveille l’activité sur Internet et aide nos autorités à identifier les résistants et les opposants au gouvernement russe. », explique un interlocuteur du ministère de l’Éducation [48].

Verba

L’association Verba, a été créée en 2023 par des artistes russes et ukrainiens exilés à Paris à la suite de l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par la Russie. Le collectif réunit des artistes de différents profils et horizons ayant le même objectif : poursuivre leur désir de création et de partage autour de valeurs communes de paix et de liberté.

Le collectif organise deux jours de manifestations culturelles les 23 et 24 mars 2024 à Montreuil. En savoir plus et s’inscrire.

Svoboda

L’ONG Reporters sans Frontières a annoncé l’aboutissement de son projet de bouquet satellitaire offrant à la population russophone de Russie, de Biélorussie et d’Ukraine « une information indépendante », produite en grande partie par des journalistes russes qui ont dû s’exiler après l’invasion russe de l’Ukraine. L’ONG finance le bouquet et la location du satellite Eutelsat pour plusieurs milliers d’euros annuels [49].

Baptisé « Svoboda » (Liberté en russe), ce bouquet se veut « une preuve que les démocraties peuvent exporter un journalisme indépendant et inverser la logique de la propagande », qui « abreuve » les citoyens russes via les médias contrôlés par l’État.

Il s’agit de pouvoir « parler de guerre et de crimes de guerre » à propos de l’Ukraine et non, comme l’impose le régime russe, d’« une opération militaire spéciale. ».

Déjà, l’offre inclut notamment Radio Sakharov, Novaya Gazeta Europe, Écho, émanation de la radio Écho de Moscou et Belarus Tomorrow. Sa vocation est de proposer du journalisme indépendant, pas de la propagande [50].

La Journée du déserteur

Le projet anti-guerre « Traverser la forêt » a déclaré le 29 février2024 Journée du déserteur. « Ils ont essayé de nous convaincre que les déserteurs étaient des traîtres et des faibles. Nous ne sommes pas d’accord avec cela. Aujourd’hui, alors que l’armée russe n’apporte que des destructions, le refus de servir devient un geste de courage et d’amour pour son pays », écrivent les militants des droits de l’Homme. Mediazona se joint à leur initiative et parle de ceux qui refusent de participer à la guerre criminelle, et de ceux qui les aident.

Grigory Sverdlin, le fondateur, en exil, de l’organisation dit que janvier 2024 a été un mois record : « Traverser la forêt » a reçu 284 demandes liées à la désertion. A titre de comparaison, en janvier 2023, il n’y en avait que 28.

« Pourquoi nous écrivent-ils : ils ont assez vu les horreurs de la guerre, ils ont vu [qu’ils sont traités comme] de la chair à canon, ils ont réalisé qu’ils ne luttaient pas contre les "fascistes", que ce qu’on leur disait à la télévision était un mensonge. »

Une autre raison est le manque de rotation : les militaires perdent progressivement tout espoir de quitter le front.

Environ la moitié des déserteurs potentiels sont des soldats sous contrat qui ont signé l’accord après le début de la guerre, 10 % avant la guerre, 30 % ont été mobilisés.

Un homme de 50 ans s’est vu proposé un emploi par le chef du village sur un chantier de construction. Il s’est retrouvé au front avec d’autres soldats dans le même cas que lui. Il a été rapidement blessé. Il a quitté son unité et Traverser la forêt l’a aidé à fuir à l’étranger.

En 2022, les tribunaux ont été saisis de 1 001 affaires d’abandon de poste. C’est une fois et demie plus qu’avant-guerre, en 2021. Souvent les peines sont avec sursis, ce qui permet de renvoyer le soldat au front plutôt qu’en prison.

En 2023, il y avait déjà eu 5 092 cas de ce type, et en janvier 2024, les forces de sécurité russes ont établi un record historique : 644 cas en un mois seulement. Depuis le début de l’année, les tribunaux ont déjà été saisis de 1 234 dossiers d’abandon de poste.

Dans les affaires relevant de la désertion, c’est-à-dire avec la volonté, plus difficile à prouver, de se soustraire définitivement aux obligations militaires, la tendance est encore plus marquée : 25 affaires en 2022, 156 l’année suivante, et déjà plus de la moitié de ce nombre (82) en seulement deux mois de 2024. Les déserteurs sont souvent arrêtés à cause de l’utilisation de leur téléphone ou de leur carte bancaire.

Le coordinateur du Mouvement des objecteurs de conscience au service militaire, Gennady, affirme qu’à l’hiver 2024, le contrôle sur le front était devenu si strict qu’il est désormais très difficile pour les déserteurs de rentrer en Russie sans aide extérieure.

Au total, depuis le début de la mobilisation de septembre 2022, les tribunaux ont été saisis de 6 308 cas d’abandon non autorisé d’une unité et de 194 cas de désertion.

Le non-respect d’un ordre n’a entraîné que cinq affaires en 2022 ; l’année suivante, 428, et dans les deux premiers mois de 2024, déjà 84 affaires reçues par le tribunal. Ces cas sont souvent liés au refus d’aller au front.

Un handicapé, Vladimir Frolov, a été mobilisé par les commissaires militaires de la RPD autoproclamée. Il a été blessé, mais les commandants ont exigé son retour au front. Il est venu à l’unité avec des béquilles, il a été enfermé, il s’est évadé en octobre et a été arrêté fin janvier [51].

Déserteurs ukrainiens

Les garde-frontières ukrainiens traquent plus sévèrement les déserteurs qui tentent de fuir le pays, parfois au péril de leur vie. « Au début, on avait 80 à 90 cas par jour. Aujourd’hui, c’est environ vingt-cinq. », affirme le porte-parole des douaniers. En deux ans, vingt-quatre Ukrainiens ont péri dans leur tentative, la plupart par noyade. 350 groupes de passeurs ont été arrêtés. Ils encourent neuf ans de prison. 3 300 faux documents ont été interceptés aux frontières. Ils coûtent jusqu’à vingt-cinq fois le salaire moyen et sont proposés sur les réseaux sociaux.

Des groupes criminels proposent une dispense en épousant, pour 7 000 dollars, une femme handicapée.

Certains ne courent pas le risque de quitter l’Ukraine et gardent simplement les faux documents sur eux pour éviter une rafle de recruteurs.

Un officier a jugé des recrues inaptes. « Ils se sont fait laver le cerveau » par la propagande russe et pourraient être un risque s’ils détenaient des données sensibles.

Des déserteurs rentrent au pays sans avoir réussi à refaire leur vie à l’étranger. Ils payent une amende et se présentent au bureau de recrutement [52].

Démobilisation en Ukraine

Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a signé un décret autorisant la démobilisation de conscrits dont le service militaire a été prolongé alors qu’il aurait dû s’achever entre le 24 février 2022, date à laquelle la loi martiale a été proclamée en réaction à l’offensive de la Russie, et aujourd’hui, selon un décret publié par la présidence [53].

Écologie

Selon un rapport du ministère ukrainien de l’environnement, fin 2023, la guerre a provoqué 60 milliards de dollars (55 milliards d’euros environ) de dégâts sur l’environnement. Les incendies ont dévasté 12 000 kilomètres carrés de forêt, soit environ 20 % de la surface forestière du pays. Des mines sont dispersées sur une surface d’environ 100 000 kilomètres carrés [54].

Merci aux auteurs de ce film épouvantable

« Merci aux auteurs de ce film épouvantable », a commenté une députée ukrainienne, Iryna Gerashchenko, en félicitant Mstyslav Chernov pour son Oscar du meilleur film documentaire, le premier obtenu par l’Ukraine. « 20 jours à Marioupol » témoigne de l’horreur des bombardements russes de la ville en 2022. Il suscite une très vive empathie avec les victimes.
« Je vais être probablement le premier réalisateur sur cette scène à dire : j’aurais aimé ne jamais avoir fait ce film », a réagi le documentariste [55].

En fouillant dans les archives de l’Observatoire des armements…

Nous avons trouvé dans le Fonds Jean-Pierre Lanvin un article du Canard enchaîné de 1989 qui relate que La Cour des comptes reproche aux industriels et aux militaires de truquer les devis. Il est illustré par cette caricature à resituer à une époque proche de la fin de la guerre froide.

Soutien à l’Ukraine résistante

Extraits d’articles de Soutien à l’Ukraine résistante [56].

Atelier féministe

L’Atelier féministe mène des actions sociales auprès des femmes.

« La guerre a suscité un débat sur la question de savoir si les mouvements féministes devaient être clairement antimilitaristes. À une époque où les Ukrainiens sont confrontés à la menace d’anéantissement physique, la position antimilitariste de certaines féministes occidentales apparaît comme un privilège, aveugle aux menaces et aux dangers réels auxquels les femmes ukrainiennes sont confrontées quotidiennement. Les féministes ukrainiennes ont adopté un message clé en ces temps difficiles : l’Ukraine a besoin d’armes. […]
De nombreuses féministes servent dans l’armée ou se portent volontaires pour répondre aux besoins du front. Les organisations féministes en Ukraine poursuivent leur travail, répondant désormais également aux besoins nés de la guerre, comme l’aide aux personnes déplacées à l’intérieur du pays et la résolution d’autres défis. Les besoins des femmes dans la société ukrainienne ont considérablement augmenté. L’insécurité économique et sociale augmente, parallèlement aux pertes d’emplois. De nombreuses femmes ont perdu leur maison et leur emploi et se sont retrouvées seules quand leurs maris ont été mobilisés sur le front. […]
En juin 2022, le gouvernement ukrainien a ratifié la convention d’Istanbul sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique. C’était l’une des principales revendications des féministes ukrainiennes depuis plusieurs années.
Les femmes soldates ukrainiennes défendent activement leurs droits dans l’armée, ce qui a entraîné des changements dans l’organisation militaire et des adaptations pour mieux répondre aux besoins des femmes. La perception du féminisme en Ukraine est en train de changer. La société commence à ne plus le considérer à travers des stéréotypes sur les femmes militantes. Une représentation collective des femmes militaires activistes, des militantes qui ouvrent des refuges et aident à résoudre des problèmes humanitaires et des femmes bénévoles, entre autres apparaît. Ce changement contribue à créer de nouveaux liens avec les partenaires et à changer la perception globale du féminisme. »

Oksana Dutchak

« Après les premiers mois de mobilisation pour défendre leurs communautés, de nombreuses personnes hésitent désormais (et certaines s’y opposent) à l’idée de risquer leur vie. Il y a de nombreuses raisons à cela, par exemple la relative localisation de la menace russe, l’attente irréaliste d’une « victoire » rapide (promue par une partie de l’establishment politique et certains faiseurs d’opinion dominants) et la déception qui en résulte, les nombreuses contradictions d’intérêts, les situations et les choix des individus dans le chaos structuré d’une guerre prolongée. Cependant, le sentiment d’injustice joue un rôle prépondérant. D’un côté, il y a le sentiment d’injustice par rapport au processus de mobilisation, où les questions de la richesse et/ou de la corruption conduisent à mobiliser majoritairement (mais pas exclusivement) des classes populaires, ce qui va à l’encontre de l’image idéale de la « guerre populaire » à laquelle participe toute la société. Et de plus quelques cas d’injustice au sein de l’armée s’ajoutent à cela. »

Dans les territoires occupés

Depuis le début de l’invasion, le mouvement de résistance dans les territoires occupés s’est considérablement accru. L’un des mouvements de résistance a créé un journal spécial pour les habitants, en particulier de Crimée. L’organisation clandestine Atesh (« feu » en tatar) a vu le jour dans la péninsule de Crimée à l’été 2022 et compte actuellement 1 800 militants. Le mouvement de résistance Ruban jaune, né le 27 avril 2022 lors d’une grande manifestation contre l’occupation de Kherson, compte actuellement plus de 3 000 participant·es actif·ves. Le mouvement partisan des femmes Zla Mavka est né en février 2023 à Melitopol. La plupart des participantes se trouvent en Crimée occupée. Actuellement, le mouvement compte plus de 500 participantes actives. Zla Mavka a créé un journal spécial destiné à la population des territoires occupés. Quatorze numéros sont parus. En 2023, des militants de la guérilla militaire Atesh ont agi à l’arrière de l’armée russe et continuent de collecter régulièrement des informations sur les installations militaires en Crimée.

Il existe des rassemblements d’Ukrainiens excédés par les conditions de vie que leur impose l’occupant russe. Ces rassemblements réunissent moins de dix personnes, en raison de graves risques qu’il y a à s’opposer aux autorités locales. Cependant, souvent les protestataires se filment et diffusent les vidéos sur les réseaux sociaux où ils (en fait souvent elles) expriment leurs doléances.

Ne les laissez pas mourir

À Odessa, le 6 janvier 2024, une action de soutien aux prisonniers a eu lieu. Les slogans « Ne vous taisez pas ! La captivité tue » étaient inscrits sur des boules suspendues à un arbre de Noël. « Pour rappeler à la société qu’il y a des prisonniers qui sont torturés chaque jour, qui attendent chaque jour leur libération, qui rêvent aussi d’être avec leurs proches, leurs enfants, à la maison. Pour rappeler qu’il y a encore des garçons qui ont besoin de liberté », détaille l’épouse d’un marin en captivité depuis vingt et un mois.

République populaire ukrainienne

Le 22 janvier 1918, la 4ème Universelle [déclaration] de la Rada centrale ukrainienne a déclaré la République populaire ukrainienne « État indépendant, indépendant, libre et souverain du peuple ukrainien » Extraits :

« Peuple d’Ukraine ! Par ta force, par ta volonté, par ta parole, une libre République démocratique vient de se créer sur la terre ukrainienne. L’ancien rêve de tes aïeux, qui ont lutté pour la liberté et pour le droit des travailleurs, s’est réalisé. […] Nous, Rada centrale ukrainienne, élue par le Congrès des paysans, des ouvriers et des soldats de l’Ukraine, […] nous ne soutiendrons plus aucune guerre. Le peuple ukrainien désire la paix ; la paix démocratique doit venir le plus tôt possible. […] Nous voulons vivre amicalement et dans une entente cordiale avec tous les États voisins, la Russie, la Pologne, l’Autriche, la Roumanie, la Turquie et les autres, mais aucun d’eux ne peut intervenir dans la vie de la République ukrainienne indépendante. Le pouvoir n’y appartiendra qu’au peuple ukrainien, au nom duquel, jusqu’à l’appel de l’Assemblée constituante, nous gouvernerons, nous Rada centrale ukrainienne, représentant le peuple des paysans, des ouvriers et des soldats, et l’organe exécutif, qui désormais s’appellera Rada des ministres nationaux. »
Conseil central ukrainien.

Biélorussie

L’organisation démocratique des travailleurs, le Congrès biélorusse des syndicats démocratiques, a exprimé la position fermement anti-guerre des travailleurs biélorusses. Les conséquences ont été des arrestations massives et des accusations criminelles à l’encontre de dirigeants syndicaux et de travailleurs en avril 2022. En outre, le Belarus est devenu un pays sans syndicats depuis juillet 2022, quand tous les syndicats démocratiques ont été liquidés. La dictature biélorusse, qui qualifie toute activité d’extrémisme et de terrorisme, ne cesse de réprimer la société civile.

Quarante-sept syndicalistes se trouvent dans des prisons et des colonies pénitentiaires au Belarus, condamnés pour haute trahison, diffamation de l’État, participation et soutien à des activités extrémistes, avec des peines allant jusqu’à quinze ans d’emprisonnement.

Selon l’organisation de défense des droits de l’homme Viasna, au 25 décembre 2023, il y avait 1 496 prisonniers politiques en Biélorussie, dont 174 femmes. Depuis 2020, au moins 895 femmes ont été poursuivies pour des raisons politiques.

De nombreux syndicalistes ont dû fuir le régime dictatorial et poursuivre leur travail en exil. Dans la ville libre de Brême en Allemagne, ils ont fondé une association, appelée Salidarnast pour soutenir les syndicalistes arrêtés et condamnés par le régime de Loukachenko [57].

Les cyberpartisans ont bloqué, le 29 décembre 2023, pendant deux jours le site Internet et le réseau interne de l’agence de presse officielle Belta [58].

Des Indiens combattants pour la Russie

Des Indiens, appâtés par une société de conseil en emploi basée à Dubaï, pensaient travailler dans cet émirat. Ils se sont retrouvés en Russie. Menacés de mort, ils ont dû signer, sans les comprendre, des engagements pour le front ukrainien [59].

Chulpan Khamatova

En Russie, Chulpan Khamatova est une actrice célèbre, notamment pour son rôle dans Good bye Lenin !

En 2012, le Kremlin l’a sommée d’enregistrer un message de soutien à Poutine pour sa réélection. Son refus aurait entraîné l’arrêt de la construction d’un hôpital pour enfants cancéreux patronnée par la fondation qu’elle dirigeait. Elle s’est exécutée la mort dans l’âme.

Le 24 février 2022, elle a appris, sur son lieu de vacances, l’invasion de l’Ukraine et a décidé d’emmener sa famille en Lettonie et de ne pas reprendre la pièce qu’elle jouait à Moscou. Son metteur en scène se souvient : « Je la savais engagée dans de nombreuses causes. Et je la comprenais quand elle se disait incapable de remonter sur scène comme si de rien n’était, alors que les bombes tombaient sur l’Ukraine. Elle aurait protesté, on l’aurait mise en prison. L’exil, pour cette insoumise, était la seule option. »

Elle transforme sa maison lettone en QG d’aide aux réfugiés. Elle cherche des places dans les hôpitaux européens pour ses protégés cancéreux.

Le metteur en scène letton Alvis Hermanis lui propose de coécrire et d’interpréter seule un spectacle mêlant les voix russes, sous-titrées en letton, de Dostoïevski et d’Anna Politkovskaïa, la journaliste assassinée en 2006. Elle reçoit le titre de l’actrice de l’année, « C’est la plus belle récompense de toute ma vie. », jubile-t-elle.

Elle joue la pièce suivante en letton, sans accent.

Son amie Evgenia Berkovich, metteuse en scène et poétesse, a été emprisonnée pour apologie du terrorisme, en l’occurrence des poèmes [60].

Russie Libertés

Russie-Libertés, Free Russia Foundation et l’association Institut Sakharov ouvrent un accélérateur pour les initiatives civiques et anti-guerre des Russes et russophones exilés à Paris qui partagent les valeurs de la démocratie et de la liberté.

L’Espace Libertés | Reforum Space est un lieu de soutien unique pour les activistes, journalistes, défenseurs des droits de l’homme, mais aussi les acteurs du domaine scientifique et culturel exilés : une plateforme qui montre les visages de la vraie Russie.

Le centre fonctionnera en coworking et fournira une aide juridique, psychologique, des cours de français et des formations.

Les résidents travailleront pour se soutenir mutuellement, créer des projets, écrire des lettres aux prisonniers, développer des initiatives humanitaires, des campagnes communes, des groupes de réflexion et construire ensemble la Russie du futur.

Anna Colin Lebedev

Anna Colin Lebedev, spécialiste des sociétés post-soviétiques répond à une interview [61] :

« On constate que l’armée [russe] à énormément de difficultés à recruter des combattants. Les pratiques d’évitement sont massives : nombreux sont ceux qui demandent à remplacer leur contrat officiel de travail par un arrangement plus officieux pour échapper plus facilement au recensement. Les pots-de-vin servent à obtenir un certificat qui libère de l’obligation de mobilisation. Il existe aussi des stratégies de contournement : en gardant une façade de loyauté, on noyaute les pratiques étatiques de l’Intérieur. Le pouvoir a par exemple introduit dans les écoles un cours d’éducation patriotique obligatoire baptisé "Leçon sur les choses importantes", dans lequel il est censé être question de la guerre. De nombreux enseignants, avec la complicité de la direction de leur école, vont considérer que les choses importantes correspondent, par exemple, aux mathématiques. C’est une forme de sabotage, de résistance douce. Dans les entreprises, les ressources humaines vont aussi prévenir que les autorités militaires arrivent, et qu’il est bon de prendre un congé maladie. »

« J’ai l’impression que, depuis un certain temps, le pouvoir russe essaye à nouveau de faire entendre sa voix en Occident, en jouant sur l’enlisement de la guerre. Autant le discours consistant à dire « l’Ukraine est à nous » ne passe plus du tout auprès du public occidental, autant les derniers messages du Kremlin sont reçus cinq sur cinq. Tous les médias occidentaux les reprennent : « L’Ukraine ne peut pas gagner », « la population russe soutient la guerre », « le pouvoir est très stable », « cette élection est gagnée d’avance »… toutes ces idées émanent du Kremlin lui-même. Tout comme l’idée que la population russe serait très conservatrice, très opposée aux valeurs occidentales. »

Tucker Carlson

Le scientifique et blogueur américain d’origine russe Lex Friedman a publié un podcast avec le journaliste Tucker Carlson, qui a enregistré début février 2024 une interview de Vladimir Poutine [62].

Friedman a demandé à Carlson ce qu’il pensait de la « dénazification » que Poutine a utilisée comme prétexte pour envahir l’Ukraine. Voici ce que Carlson a répondu :

« Je pensais que c’était l’une des choses les plus stupides que j’aie jamais entendues. […] C’est une façon de qualifier les gens de méchants.

Poutine n’aime pas les nationalistes ukrainiens. Poutine déteste le nationalisme en général. Bien sûr, parce qu’il compte 80 républiques différentes et qu’il a peur des mouvements nationalistes. C’est pour cette raison qu’il a mené une guerre en Tchétchénie... Je suis pour le nationalisme, je suis pour le nationalisme américain, donc je ne suis pas d’accord avec Poutine sur ce point. Mais appeler [les Ukrainiens] nazis, je pense que c’est puéril [63]. »

Hommage à Alexeï Navalny

Le jour de l’enterrement d’Alexeï Navalny, 91 personnes ont été arrêtées dans 19 villes russes [64]. Le lendemain, des sympathisants ont continué à fleurir sa tombe [65].

Des milliers de personnes massées pour rendre hommage à Alexeï Navalny

Créé par des journalistes indépendants, un site est apparu sur Internet à la mémoire d’Alexeï Navalny https://www.remember-navalny.io . Il permet aux personnes qui ne peuvent pas se rendre aux funérailles d’Alexeï Navalny ou qui craignent d’y aller en raison de la forte présence policière d’allumer une bougie numérique en mémoire de l’opposant. En vingt-quatre heures, plus de 200 000 bougies ont été allumées.

Éradication culturelle

Les bibliothèques ukrainiennes doivent obéir à des recommandations officielles pour retirer les livres soutenant l’invasion ou la suprématie russe. « Tout d’un coup, on s’est retrouvés en première ligne, pris entre l’art, la guerre et ce que chacun d’entre nous vit aujourd’hui dans son intimité. », explique une bibliothécaire. Des bibliothèques écartent les classiques russes dans des remises dérobées ou au département de littérature étrangère. « On ne les expose plus, on ne les conseille plus, mais on les donne à la demande. On ne peut quand même pas dire aux gens : "C’est interdit !" » « Ces auteurs sont reconnus dans le monde entier et nous, on les exclut. Est-ce juste ? »

« Chez nous il a fallu les fachos russes pour que beaucoup apprennent à aimer notre pays et prennent conscience de la valeur de notre langue. »

L’autrice de langue ukrainienne Svitlana Povalyaeva a commencé à publier en 2000. « Nous étions marginaux à l’époque, avec des tirages modestes mille exemplaires peut-être. Mais, pour nous, c’était une mission : prouver que nous n’étions pas des petits paysans parlant patois dans leur hutte, comme l’ont toujours soutenu les Russes. Nous voulions nous inscrire dans le paysage littéraire international. »

Lorsque l’armée russe aura définitivement quitté l’Ukraine, explique une bibliothécaire, « on pourra réfléchir sans un pistolet sur la tempe » et ressortir Pouchkine, Tolstoï et Dostoïevski des caves [66].

[1Arnaud Vaulerin, « Attentat : Le Kremlin refuse de s’expliquer sur les tortures infligées aux suspects », Libération, 26 mars 2024.

[2Dimitri Minic, « Les Russes semblent condamnés à subir la chasse aux menaces imaginaires du Kremlin », Le Monde, 28 mars 2024.

[5Benoît Vitkine, « Le Kremlin face à une vague anti-islam », Le Monde, 30 mars 2024.

[7Emmanuel Grynszpan, « Les habitants de Belgorod se sentent abandonnés par Moscou », Le Monde, 30 mars 2024.

[10Léo Ruiz, Guillaume Vénétitay, « Regarde les Russes tomber », Lucas Duvernet-Coppola, Juliette Guéron-Gabrielle, « Les derniers moments de liberté d’Alexeï Navalny », Society, 14-27 mars 2024.

[11Traduit par Nikita Mouravieff, « En tuant Alexeï Navalny, Vladimir Poutine a rendu immortel son rêve d’une Russie libre et ouverte au monde », Le Monde, 28 mars 2024.

[13https://fr.wikipedia.org/wiki/Dmitri_Gloukhovski, consulté le 29+ mars 2024.

[14Giuliano Da Empoli, propos recueillis par Alexandra Schwartzbrod, « L’avantage de l’époque est que chacun est libre de choisir son apocalypse », Libération, 29 mars 2024.

[15Nicolas Quenel, « Soldat de Poutine, au nom du tsar », Le Point, 28 mars 2024.

[16Anne Boulogne, « Dans les prisons biélorusses, 1 400 opposants toujours détenus », La Croix, 26 mars 2024.

[17Thomas d’Istria, « À Odessa, les enrôlements illégaux crispent les jeunes ukrainiens », Le Monde, 29 mars 2024.

[18Clara Marchand, « En Ukraine, les journalistes sous pression face au "secret-défense" », Le Figaro, 29 mars 2024.

[21Benoît Vitkine, « En Russie, l’ampleur de la fraude lors de la présidentielle émerge », Le Monde, 22 mars 2024.

[22Emmanuel Grynszpan, « À l’étranger, la diaspora répond à l’appel de l’opposition », Le Monde, 19 mars 2024.

[24Alain Barluet, « "Le Maître et Marguerite" revient hanter le Kremlin », Le Figaro, 7 février 2024.

[26Thomas d’Istria, « L’opposition de plus en plus critique envers l’administration Zelensky », Le Monde, 19 mars 2024.

[27Présentation Sonia Devillers, https://www.arte.tv/fr/videos/116710-045-A/le-dessous-des-images, 18 mars 2024, consulté le 19 mars 2024.

[28Céline Lussato, « La machine à broyer », L’Obs, 14 mars 2024.

[29Propos recueillis par Veronika Dorman, « En Russie, il n’y a pas d’élections mais du théâtre de mauvaise facture », 15 mars 2024.

[31« Une opinion publique acquise à la guerre ? », 27 février 2024, repris par Courrier international, 14 mars 2024.

[32Propos recueillis par Petra Prochazkova, « Les Russes ont besoin de Poutine pour se rassurer », Denik N (Prague), 13 décembre 2023, repris par Courrier international, 14 mars 2024.

[34https://ovd.info, consulté le 18 mars 2024.

[36Maria Klimova, https://zona.media/news/2024/03/06/ivanov, publié et consulté le 6 mars 2024.

[37https://zona.media/news/2024/03/06/savin, publié et consulté le 6 mars 2024.

[39Vera Friedland, « Pluie d’hommages sur la tombe de l’opposant », Libération, 7 mars 2024.

[40Patrick Forestier, Poutine contre la France, Le Cherche Midi, janvier 2024, 352 pages, 21 euros, ISBN 9-782749-177236. Cf. note de lecture sur notre site

[41Thoma Eydoux et Morgane Le Cam, « La propagande russe en Afrique se réorganise », Le Monde, 9 mars 2024.

[48Liliya Yapparova, https://meduza.io/feature/2024/03/11/oni-mogut-nachat-protivodeystvovat, publié et consulté le 11 mars 2024.

[49Philippe Jacqué, « Svoboda, un bouquet satellitaire pour contrer la propagande du Kremlin », Le Monde, 7 mars 2024.

[51Dmitri Chvets, Sergueï Golubev, https://zona.media/article/2024/02/29/desertion-day, 29 février 2024, consulté le 6 mars 2024.

[52Faustine Vincent, « Mariage blanc, faux papiers… La quête sans fin d’Ukrainiens pour éviter la mobilisation », Le Monde, 6 mars 2024.

[56Brigades éditoriales de solidarité, « La guerre an III », Soutien à l’Ukraine résistante, n° 27, 24 février 2024.

[57Lettre d’information syndicale de l’ENSU, https://drive.google.com/file/d/1ctPXIzjrM_xZrLb24gdPgmeo6gcxqxBq/view, janvier 2024, consulté le 28 février 2024.

[58Brigades éditoriales de solidarité, « Bélarus : les cyberpartisans piratent l’agence de presse officielle Belta », Soutien à l’Ukraine résistante, n° 27, 24 février 2024.

[59Jehanjir Ali et Sophie Landrin, « Des Indiens recrutés à leur insu dans les troupes de Moscou », Le Monde, 1er mars 2024.

[60Annick Cojean, « Good bye Poutine ! », Le Monde, 1er mars 2024.

[61Propos recueillis par Manon Paulic, « En Russie, de multiples stratégies de contournement de la guerre », Le Un, 21 février 2024.

[62Le Un du 21 février 2024, a publié de larges extraits de l’interview, sélectionnés par Sylvain Cypel et traduits par Paul Lequesne. Patrice Trapier a recueilli les commentaires d’André Markowicz sur ce sujet, Eric Fottorino ceux de Dominique de Villepin et Manon Paulic ceux de Michel Foucher.

[64https://ovd.info, publié et consulté le 2 mars 2024.

[66Florence Aubenas, « Grand ménage dans les bibliothèques d’Ukraine », M le magazine du Monde, 2 mars 2024.

Retrouvez la onzième partie de cette rubrique, février 2024

Retrouvez la dixième partie de cette rubrique, janvier 2024

Retrouvez la neuvième partie de cette rubrique, novembre-décembre 2023

Retrouvez la huitième partie de cette rubrique, septembre-octobre 2023

Retrouvez la septième partie de cette rubrique, juillet-août 2023

Retrouvez la sixième partie de cette rubrique, juin 2023

Retrouvez la cinquième partie de cette rubrique, mai 2023

Retrouvez la quatrième partie de cette rubrique, mars et avril 2023

Retrouvez la troisième partie de cette rubrique, janvier et février 2023

Retrouvez la deuxième partie de cette rubrique, décembre 2022

Retrouvez la première partie de cette rubrique, novembre 2022

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