Rappelons d’abord que le président Chirac a suspendu le service militaire. Pas abrogé mais suspendu. Ça signifie qu’il pend toujours au nez des jeunes gens et pourrait, par bravade patriotique, être réactivé à tout moment.
Le service militaire était précédé d’un jour et demi de tests SIGYCOP destinés à fixer l’orientation des conscrits. SIGYCOP ? S et I respectivement pour les membres supérieurs et inférieurs, G pour l’état général, Y pour les yeux, C pour le sens chromatique, O, les oreilles et P le psychisme. Une note de 1 à 5 est associée à chaque lettre, 1 étant la meilleure. Une seule note supérieure à 3 exempte du service national. Les réfractaires au service militaire, de plus en plus nombreux, avaient le choix entre un service de coopération, un service civil comme objecteurs de conscience et, au risque d’être emprisonnés, la désertion et l’insoumission. Mais certains espéraient l’exemption dans une catégorie SIGYCOP. Beaucoup d’entre eux tentaient d’obtenir la classification P4, fada !
Le livre recueille les souvenirs d’une douzaine d’appelés qui, par conviction, ont tenté cette démarche. Certains bénéficiaient de certificat de complaisance, d’autres simulaient une maladie mentale. À une seule exception, l’ami Jean-Michel, ils ont obtenu satisfaction. Aucun ne fait état d’une quelconque répercussion sur sa vie en général et son activité professionnelle en particulier. P4 ou non, ils ont une qualité d’écriture qui, malgré la similitude de la plupart des parcours, garde l’intérêt intact.
Le livre est illustré de dessins de Cabu et entrecoupé de chansons, par exemple de Gaston Couté.
Il est dommage que le titre sibyllin soit peu repérable sur une couverture surchargée et en décourage l’achat.
Guy Dechesne