Stanislav Asseyev est originaire de Donetsk. D’abord séduit par l’idée littéraire du monde russe (Russki mir) défendue par Poutine, il déchante en découvrant sa réalité. Il rédige pour Radio Liberty des articles sur la vie quotidienne sous occupation russe. Il est arrêté, torturé et condamné deux fois à quinze ans de prison puis échangé contre des prisonniers russes. Il publie un livre de témoignage et s’engage en février 2022 dans la défense territoriale.

Maria Chashka, ancienne professeure de littérature ukrainienne, s’est engagée dans l’armée en 2015. Elle est devenue commandante d’un bataillon où une compagnie est constituée d’une vingtaine de nationalités occidentales.

Rouslan a défendu Marioupol avec le régiment Azov. Il y a perdu une jambe. Il termine son récit en évoquant un monument militaire d’une ville russe où le « Z », symbole de l’invasion de l’Ukraine, a été transformé en « Azov ».

Ihor Martinkovskyy, chef d’une entreprise florissante de travaux publics, a mis ses véhicules à la disposition de l’armée. Il a ensuite rempli la fonction de chauffeur avant de combattre sans contrat. Sans la légère forfanterie de certains autres témoignages, il admet « La peur de la mort te hante à tout moment et transforme tout en toi. », au point d’en oublier sa famille.

Maksym Lutsyk, russophone de naissance, a choisi de ne plus parler que l’ukrainien. D’abord volontaire dans la défense territoriale, il demande à combattre en première ligne. Il rapporte qu’une brigade ukrainienne a déserté à deux reprises en abandonnant ses positions, ses équipements et ses véhicules, à cause d’un approvisionnement défaillant.

Gundars Kalve est letton. Enrôlé, en 1989, dans l’armée soviétique en Lituanie, il refuse de participer à la répression des mouvements pacifiques par ce qu’il dénonce comme une force d’occupation. Il subit plusieurs mois de cachot. Quand il apprend l’échec du putsch conte Gorbatchev en 1991, il déserte. Il s’engage cinq ans dans la garde nationale lettone. Il se lance dans l’agriculture au point de devenir un des premiers propriétaires fonciers lettons. À cinquante-deux ans, il rejoint l’armée ukrainienne. Il dit combattre aussi pour la Lettonie, l’Europe et contre la barbarie.

Yuriy Tay naît en Ouzbékistan et passe sa jeunesse en Russie dont il a la nationalité. Il rejoint sa sœur en Ukraine. Lors de l’invasion, il se joint aux combattants ukrainiens.

Vano Nadiradzé est géorgien. Il participe à la guerre en Abkhazie. Après l’annexion de la Crimée, il va en Ukraine et devient chef d’état-major du bataillon du Donbass. Il décrit l’état lamentable des forces armées ukrainiennes en 2014 : alcool, drogue, sous-équipement. Après trente ans de guerre contre la Russie et neuf ans sans avoir vu sa famille, il conclut : « Je crois que le moment est venu pour moi de rentrer à la maison. »

Le Russe Ilya Bogdanov a toujours désiré devenir militaire. Il étudie à l’institut des garde-frontières du FSB. Volontaire pour le Daghestan, il travaille sur le renseignement à propos du djihadisme jusqu’à ce qu’il soit convaincu que Moscou ne souhaite pas la fin du terrorisme mais profite de la déstabilisation qu’il engendre. Lors de la révolution de Maïdan, il intègre le bataillon du Donbass. Il reprend les armes lors de l’invasion de 2022 et est blessé au bras. Il dit avoir évité plusieurs tentatives d’assassinat.

Alexandre Chekulaev est géorgien. Il rejoint en Ukraine des centaines de volontaires de nombreux pays dans la légion internationale. Les consommateurs de haschisch ou d’alcool sont expulsés. Le salaire moyen y est de 1 000 dollars mais un snipper réputé peut gagner trois fois plus. Un Anglais, apprenant le montant du salaire est aussitôt reparti. D’autres le font dès les premiers combats.

Le livre n’est pas une étude sociologique. Ne donnant la parole qu’à des volontaires, il ne précise pas dans quelle mesure ils représentent l’opinion générale des troupes. Il laisse apparaître, à travers des témoignages techniques ou plus humains, que la guerre est d’abord une affaire de souffrances et de mort. Même si la Russie perd la guerre, l’Ukraine ne sera pas vainqueur. Nous ne pouvons que déplorer ses pertes.

Guy Dechesne