La seconde guerre en Irak n’est évidemment pas sortie du néant ; elle a été jouée d’avance. Et les logiciels qui l’ont simulée sont les produits d’une conjonction d’intérêts entre universitaires, industrie du loisir et le Pentagone aux ramifications aussi improbables que souterraines. Avec un certain retard, l’armée française vient de saisir le filon et commence également à recourir aux simulateurs — qui nous en disent long sur le type de conflits à venir.
En avril 2000, le ministre du commerce japonais a limité l’exportation de la console de Sony, la Playstation 2, parce que le logiciel puissant qui lui était intégré pouvait aisément être adapté en système de guidage de missiles par des terroristes situés, par exemple, sur le sol de la Corée du Nord [1]. Le fait a beau être éloquent, il ne révèle que la face émergée de l’iceberg. Ce n’est pas d’hier que la technologie des jeux vidéo, émanation d’une industrie pesant 25 milliards de dollars par an, est soluble dans l’univers kaki. Pourtant, le phénomène demeure compliqué à analyser. La faute en est à ses multiples facettes impliquant une pléiade d’acteurs pas toujours faciles à identifier. Une chose est sûre, le lien entre les jeux vidéo et l’armée s’inscrit dans l’histoire même de ce média.
Il mériterait d’être connu de tous, dans la mesure où il prend une de ses dimensions majeures dans les foyers, sur nos téléviseurs et écrans d’ordinateur, et que son existence dépend en partie du consentement du consommateur.
Sommaire
- En France, introduction récente des Serious Games militaires
- Comment l’Institute for Creative Technologies a préparé la guerre contre le terrorisme
- Notes de lecture
[1] Stephen Kline, Nick Dyer-Whiteford, Greig de Peuter, Digital Play : The Interaction of Technology, Culture, and Marketing, McGill-Queen’s University Press, Montréal, 2003, p. 179