Forces nucléaires mondiales : des réductions lentes tandis que la modernisation se poursuit
Début 2018, neuf États – États-Unis, Russie, Royaume-Uni, France, Chine, Inde, Pakistan, Israël et République populaire démocratique de Corée (Corée du Nord) – disposaient d’environ 14 465 armes nucléaires. Cela représente une diminution par rapport aux 14 935 armes nucléaires possédés par ces États début 2017, selon les estimations du Sipri.
La diminution du nombre total d’armes nucléaires dans le monde est due principalement à la Russie et aux États-Unis – qui détiennent encore à eux deux près de 92 % des armes nucléaires mondiales – qui continuent de réduire leurs forces nucléaires stratégiques conformément à la mise en œuvre du Traité sur les mesures de réduction et de limitation supplémentaires des armes stratégiques offensives (New Start).
Malgré des réductions limitées de leurs forces nucléaires, la Russie et les États-Unis ont, en cours, des programmes à long terme pour remplacer et moderniser leurs têtes nucléaires, leurs systèmes de lancement de missiles et d’avions et leurs installations de production d’armes nucléaires. La dernière Nuclear Posture Review (NPR) des États-Unis, publiée en février 2018, a réaffirmé les programmes de modernisation et approuvé le développement de nouvelles armes nucléaires. La NPR a également mis l’accent sur l’expansion des options nucléaires pour dissuader et, si nécessaire, vaincre les attaques stratégiques nucléaires et « non nucléaires ».
« L’attention renouvelée portée à l’importance stratégique de la dissuasion et de la capacité nucléaires est une tendance très préoccupante », précise l’ambassadeur Jan Eliasson, président du Conseil d’administration du Sipri. « Le monde a besoin d’un engagement clair des États dotés d’armes nucléaires pour un processus efficace et juridiquement contraignant vers le désarmement nucléaire. »
Les arsenaux nucléaires des autres États dotés d’armes nucléaires sont considérablement plus petits, mais tous développent ou déploient de nouveaux systèmes d’armes nucléaires ou ont annoncé leur intention de le faire. L’Inde et le Pakistan étendent leurs stocks d’armes nucléaires et développent de nouveaux systèmes de lancement de missiles terrestres, maritimes et aériens. La Chine continue de moderniser ses systèmes de lancement d’armes nucléaires et augmente lentement la taille de son arsenal nucléaire.
En 2017, la Corée du Nord a continué de faire des progrès techniques dans le développement de ses capacités en matière d’armes nucléaires, dont le test en septembre de ce qui était censé être une arme thermonucléaire. La Corée du Nord a également fait preuve de progrès rapides et inattendus dans l’essai de deux nouveaux types de systèmes de lancement de missiles balistiques à longue portée.
« Malgré l’intérêt international manifeste pour le désarmement nucléaire qui s’est traduit dans la conclusion en 2017 du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, les programmes de modernisation en cours dans les États dotés d’armes nucléaires indiquent que de véritables progrès vers le désarmement nucléaire demeurent un objectif lointain », souligne Shannon Kile, chercheur principal au programme Désarmement, Contrôle des armements et Non-prolifération du Sipri.
Forces nucléaires mondiales (janvier 2018)
Le nombre de casques bleus chute à l’échelle mondiale, malgré une demande croissante
63 opérations multilatérales de maintien de la paix ont eu lieu en 2017 (une de plus par rapport à 2016) : 25 opérations ont été déployées en Afrique, 18 en Europe, 9 au Moyen-Orient, 6 en Asie et en Océanie et 5 dans les Amériques.
Le nombre total de personnel déployé dans le cadre des opérations multilatérales de maintien de la paix a diminué de 4,5 % en 2017, passant de 152 822 à 145 911. Près des trois quarts du personnel était basé en Afrique. La diminution du nombre de personnel s’explique par la diminution de 7,6 % des déploiements effectués par les Nations Unies, alors que le nombre de personnel des opérations autres que celles des Nations Unies a augmenté de 2,3 % pour atteindre 47 557.
Bien que l’ONU demeure clairement le principal acteur des opérations de maintien de la paix, les acteurs Africains assurent un rôle croissant dans les questions de paix et de sécurité en Afrique. Cela se reflète dans la création en février 2017 de la Force conjointe des États du G5 Sahel (FC-G5S)
La réforme en matière de maintien de la paix a été en tête des priorités internationales en 2017. Cependant, les discussions ont été éclipsées par deux autres faits marquants au cours de l’année : l’insécurité grandissante du personnel déployé dans les opérations de maintien de la paix des Nations Unies ; et les efforts – en particulier de la part de l’administration américaine – de réduire considérablement le budget de maintien de la paix des Nations Unies.
En 2017, les missions de l’ONU ont connu une recrudescence dramatique de décès liés à des actes hostiles – en termes absolus (de 34 en 2016 à 61 en 2017) et en proportion du nombre de personnel en uniforme déployés (de 0,31 à 0,61 pour 1 000 personnel en uniforme). Alors qu’au cours des années précédentes, la plupart des décès se sont produits lors de la mission des Nations Unies au Mali ; en 2017 les opérations des Nations Unies en République centrafricaine et en République démocratique du Congo ont également subi des pertes substantielles.
« Un rapport indépendant portant sur la sécurité des casques bleus (Rapport Cruz, 2017), recommande que les opérations de maintien de la paix des Nations Unies adoptent une position plus robuste et moins risquée », précise Timo Smit, chercheur au programme Gestion de conflit et Maintien de la paix du Sipri. « Cependant, cela soulève une question, qui n’a pas été abordée par le rapport Cruz, quant à la façon dont l’ONU devrait générer des forces suffisantes qui soient à la fois disposées et capable d’adopter une telle posture. »
En 2017, les opérations de maintien de la paix de l’ONU – tout comme les opérations africaines de maintien de la paix – ne pouvaient plus être garanties d’un financement prévisible et durable. Les coupes budgétaires et la réduction des troupes correspondantes ont obligé l’ONU à repenser sa stratégie dans de nombreuses opérations. « Est-il réaliste de s’attendre à ce que les Nations Unies continuent de faire plus avec moins, et cela vaut-il la peine de prendre le risque ? » interroge Dr Jair van der Lijn, directeur du programme Gestion de conflit et Maintien de la paix du Sipri.
« Un certain nombre de pays contributeurs espéraient que les restrictions budgétaires pourraient être utilisées de manière pragmatique pour renforcer la réforme en matière de maintien de la paix. Cependant, les effets réels de la coupe budgétaire sur certaines opérations ont probablement exposé les casques bleus à des risques supplémentaires et rendu les populations plus vulnérables », explique Van der Lijn.