Les armes nucléaires étaient les seules armes de destruction massive qui n’étaient pas encore couvertes par un traité d’interdiction, malgré les conséquences humanitaires et catastrophiques provoquées en cas de détonation intentionnelle ou accidentelle. Les armes biologiques ont été en effet interdites en 1972 et les armes chimiques en 1992.

L’adoption de ce traité par l’ONU marque le début de la fin de l’ère nucléaire. Car il est incontestable que les armes nucléaires violent les lois de la guerre et constituent un danger manifeste pour la sécurité mondiale. Personne ne croit que le fait de tuer indistinctement des millions de civils est acceptable — peu importe la circonstance. Pourtant, c’est bien ce pourquoi les armes nucléaires sont conçues.

Aujourd’hui, la communauté internationale a rejeté les armes nucléaires et a précisé qu’elles sont inacceptables. Il est temps pour les dirigeants du monde entier de faire correspondre leurs valeurs et leurs mots en signant et en ratifiant ce traité comme la première étape vers l’élimination des armes nucléaires.

Le traité crée également des obligations pour soutenir les victimes de l’utilisation d’armes nucléaires (Hibakusha) et des essais et pour réhabiliter les dommages environnementaux causés par ces armes. La France ne pourra pas échapper à ses responsabilités vis-à-vis des Algériens et des Polynésiens qui ont été affectés directement par ses essais nucléaires…

L’objection répétée et le boycott des négociations par les États ayant des armes nucléaires démontrent que ce traité a un impact significatif sur leur politique. L’Histoire nous a montré que cela a été le cas avec les autres traités d’interdiction d’armes (mines antipersonnel, sous-munitions). L’évolution des normes internationales conduit à des changements concrets dans les politiques et les comportements militaires, même dans les États qui ne sont pas parties au traité. C’est pourquoi, le traité prévoit la possibilité pour les États dotés d’armes nucléaires d’y adhérer en s’engageant avec un calendrier à détruire leurs arsenaux.

Les travaux visant à interdire les armes nucléaires ont bénéficié du large soutien des organisations internationales humanitaires, environnementales, de non-prolifération et de désarmement dans plus de 130 États. Une importante mobilisation a eu lieu partout dans le monde — dans le cadre de ICAN, la campagne internationale pour abolir les armes nucléaires —, plusieurs milliers de personnes ont signé des pétitions, ont réalisé des manifestations et ont conduit des actions de plaidoyer vers leurs gouvernements et parlementaires.

La France, en dépit de son engagement à poursuivre de bonne foi des négociations sur des mesures efficaces relatives au désarmement nucléaire n’a pas participé à ces négociations historiques. Au cours des derniers jours, son attachement à la dissuasion nucléaire a d’ailleurs été réaffirmé à de nombreuses reprises, notamment avec la publication d’un rapport du Sénat sur La nécessaire modernisation de la dissuasion nucléaire, ou avec la visite du président Macron à l’Île Longue le 4 juillet dernier…

Il est très décevant de constater que la France s’entête à poursuivre sa doctrine de dissuasion nucléaire, à moderniser son arsenal, et à ignorer l’avancée majeure que représente ce traité.

Avec l’adoption du traité d’interdiction par l’ONU, nous disposons d’un nouvel outil fort qui va nous permettre d’appuyer notre travail auprès de la population française et des représentants politiques avec pour objectif la vision d’un monde exempt d’armes nucléaires.