Comme la presse l’a largement rapporté, la guerre au Yémen a des conséquences dramatiques sur les populations civiles et les infrastructures vitales du pays, y compris les hôpitaux, les écoles et l’accès à l’eau potable, en violation flagrante du droit international humanitaire (DIH) et en grande partie en raison des frappes aériennes menées par l’Arabie saoudite et ses alliés, selon plusieurs rapports des Nations Unies [1].

Les associations membres du réseau ENAAT (European Network Against Arms Trade) confirment que les États membres de l’Union européenne sont les principaux fournisseurs d’armes à l’Arabie saoudite, selon les données publiées dans les rapports parlementaires des États membres.

Selon le Sipri, 59 % des importations d’armes à destination de l’Arabie saoudite provenaient des pays de l’Union européenne entre 2009 et 2014. Entre 2009 et 2013, ces derniers lui ont délivré pour un montant de 19 milliards d’euros d’autorisations d’exportations d’armes. En 2015, la France a enregistré 16 milliards d’euros de contrats d’armement. 75 % des prises de commande seraient à destination du Moyen-Orient[ Laurent Lagneau [2]

Cette politique constitue une violation claire de la Position commune de l’Union européenne sur le contrôle des exportations d’armes et du Traité sur le commerce des armes, entré en vigueur le 24 décembre 2014 [3].

En vue de la réunion informelle du Conseil des affaires étrangères se tenant à Amsterdam les vendredi 5 et samedi 6 février, nous appelons :

  • les États-membres à suspendre immédiatement tous les transferts d’armes et toute forme de soutien militaire à l’Arabie saoudite et ses alliés dans ce conflit ;
  • l’adoption rapide par le Conseil de l’Union européenne d’un embargo sur les armes (incluant la formation militaire) contre l’Arabie saoudite et ses alliés ;
  • une interprétation beaucoup plus stricte de la Position commune de l’UE et le renforcement du contrôle parlementaire national qui en découle au sein de chacun des États membres. Concernant la situation de la France, vous pouvez consulter le rapport de l’Observatoire des armements qui fournit des propositions précises.

À l’heure où le Parlement français examine une loi érigeant en délit pénal la violation des embargos  [4], notamment décidés par l’Union européenne, les députés européens français ont la responsabilité d’encourager un contrôle plus ferme des armements par les différents États membres de l’Union européenne, notamment la France. Il est en effet incohérent de vouloir lutter contre les trafics d’armes tout en menant parallèlement une politique d’exportation d’armes débridée qui ignore délibérément les critères de la Position commune.

Signataires :

[1« Statement by the High Commissioner for Human Rights to the United Nations Security Council », ONU, Haut-Commissariat aux droits de l’homme, 22 décembre 2015, http://www.ohchr.org/EN/NewsEvents/Pages/DisplayNews.aspx?NewsID=16917&LangID=E

[2En 2015, le montant des exportations françaises d’armements a atteint 16 milliards d’euros, Zone Militaire, http://www.opex360.com/2016/01/19/en-2015-le-montant-des-exportations-francaises-darmements-atteint-16-milliards-deuros/#5dEDmOTj6p0yB1PS.99.

[3Le critère 2 de la Position commune énonce que les États membres devraient refuser de délivrer des licences dès lors qu’il y a un risque clair que l’équipement peut être utilisé à des fins de violation du droit international humanitaire. L’article 6 du TCA énonce des obligations similaires.

[4Projet de loi relatif à la violation des embargos et autres mesures restrictives, n° 732, site de l’Assemblée nationale, http://www.assemblee-nationale.fr/14/dossiers/violation_embargos.asp