« Après deux ans de discussions multilatérales sur les questions concernant les systèmes d’armes létales autonomes, il est l’heure pour les États d’approuver un processus plus formel visant à créer une nouvelle loi internationale sur ces armes », a déclaré la Campagne pour stopper les robots tueurs.

L’objectif est d’établir le principe du « contrôle humain significatif » sur les décisions concernant les cibles et l’attaque, afin d’assurer que ces fonctions critiques ne seront jamais déléguées aux machines. « Nous sommes de plus en plus préoccupés par le fait que les discussions informelles aux Nations Unies sur les armes autonomes ont des objectifs trop modestes, et vont trop lentement » déclare Mary Wareham, de Human Rights Watch qui coordonne la Campagne pour stopper les robots tueurs. « Les développement rapides de la technologie vont beaucoup plus vite que la diplomatie. Les gouvernements doivent prendre des mesures concrètes ayant pour objectifs les négociations d’une interdiction préventive des armes autonomes. »

Plusieurs systèmes robotisés, avec des degrés variés d’autonomie et de létalité sont actuellement utilisés par des armées avec des capacités de haute technologie, y compris la Chine, la Corée du Sud, les États-Unis, Israël et le Royaume-Uni. Sans nouvelles contraintes, cette tendance résultera dans l’existence de systèmes d’armes qui donneront toute l’autonomie aux machines.

Ces pays, et d’autres ont participé à la session annuelle de la Première commission de la 70e Assemblée générale des Nations Unies sur le désarmement et la sécurité internationale à New York en octobre dernier. Les États ne devaient pas prendre de décisions formelles pendant la Première commission sur les armes autonomes mais pour la troisième année consécutive, ils ont utilisé cette occasion pour exprimer leurs positions sur cette question.

La Première commission était un moment important pour indiquer notamment si les États souhaitaient continuer et étendre leur discussion sur les armes autonomes à la prochaine réunion annuelle des États parties à la Convention sur les armes conventionnelles (CCW), à Genève le 13 novembre. Lors de la session 2015 de la Première commission plus de 30 États, dont l’Afrique du Sud, l’Allemagne, l’Autriche, la Chine, le Costa Rica, Cuba, les États-Unis, la France, l’Inde, le Liban, le Pakistan, les Pays-Bas, la Pologne et la Turquie ont inclus les armes autonomes dans leurs déclarations, de même que le Mouvement des non alignés, les États nordiques, l’Union européenne, le groupe des États arabes et le groupe des États africains. Des interventions ont également été faites par le Comité international de la Croix-Rouge et la Campagne pour stopper les robots tueurs. Avec pour la première fois le Botswana, le Koweït, le Liban et la Roumanie, ce sont 62 pays qui se sont exprimés sur ce sujet depuis 2013. La plupart de ces États ont recommandé que les discussions continuent en 2016.

L’Autriche a proposé que les États parties à la CCW approuvent l’établissement d’un Groupe d’experts gouvernementaux formel pour approfondir et intensifier le débat international actuel. Les Pays-Bas ont également approuvé l’instauration d’un tel groupe pour développer les discussions et « approfondir notre compréhension ce que signifie exactement un “contrôle humain significatif” lorsque l’on parle de systèmes d’armes ». Pour l’organisation hollandaise PAX, co-fondatrice de la Campagne pour interdire les robots tueurs, il est moralement inacceptable de céder la décision de prendre une vie humaine à une machines. «  Nous nous opposons fondamentalement à des armes qui opéreraient sans contrôle humain significatif  » a déclaré à New-York Mme Miriam Struyk, membre de PAX. «  Les décisions de faire usage de la force contre un être humain doivent toujours être prises par un être humain. »

La Campagne pour interdire les robots tueurs soutient toute action visant à répondre aux problèmes poses par les armes autonomes dans tous les forums, y compris dans le cadre de la Convention sur les armes conventionnelles ou, en 1995, un protocole interdisant les armes lasers aveuglantes fournit un exemple pertinent d’une arme qui a été interdite avant qu’elle ne se retrouve sur le terrain, et qu’elle ne soit utilisée. C’est ce que démontre Human Rights Watch et le laboratoire des droits humains internationaux de l’Université de Harvard dans un nouveau rapport présenté à Genève cette semaine.

La Campagne pour stopper les robots tueurs appelle les États à établir et exprimer leurs positions sur les armes autonomes et à travailler urgemment pour adopter une interdiction préventive à travers un traité international, ainsi que des lois nationales et autres mesures. Elle espère que les 12 et 13 novembre les États mettront en place ce Groupe d’experts gouvernementaux formel qui permettra d’avancer dans les discussions de manière concrète.

Note complémentaire

Il y a trois ans un petit groupe d’organisations non gouvernementales à New York établissait la Campagne pour arrêter les robots tueurs afin de travailler à une interdiction préventive des armes qui sélectionneraient leur cible, et attaqueraient sans intervention humaine. Depuis, la campagne est devenue une coalition globale de plus de 55 ONGs.

Des appels pour interdire les armes létales autonomes ont été faits par :

  • les gouvernements de Bolivie, Cuba, Équateur, Égype, Ghana, Pakistan, État de Palestine et le Vatican. La Croatie, l’Irlande, le Sri Lanka et d’autres nations ont déclaré que l’appel à une interdiction devait être considéré.
  • 21 lauréats du Prix Nobel de la Paix, incluant les anciens présidents de Pologne, Costa Rica, Afrique du Sud et Timor Leste
  • Plus de 70 chefs religieux de communautés différentes
  • Environ 2800 experts de l’intelligence artificielle et de la robotique
  • La société privée canadienne Clearpath Robotics
  • Le Parlement européen, qui a adopté, en 2014, une résolution appelant à l’interdiction « du développement, de la production et l’utilisation des armes létales autonomes qui permettent des frappes sans intervention humaine ».

La Campagne pour interdire les robots tueurs cherche à créer une réponse coordonnée de la société civile aux nombreux défis éthiques, juridiques, techniques posés par les armes autonomes. Elle est menée par cinq organisations non gouvernementales internationales — Human Rights Watch, Comité international pour le contrôle des armes robotisées (ICRAC), Initiative des Femmes Nobels (Nobel Women’s Initiative), Pugwash Conferences on Science & World Affairs et Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté (WILPF) — et quatre organisations nationales qui travaillent au niveau international : Article 36 (UK), Association for Aid and Relief (Japon), Action Mines Canada, and PAX (Pays-Bas).

Article écrit d’après les communiqués de la Campagne internationale pour interdire les robots tueurs.